Deux jours après que le président Recep Tayyip Erdoğan a menacé d’« entrer en Israël, comme il est entré dans le Karabakh et en Libye », l’ennemi israélien a assassiné le chef du bureau politique du Hamas, Ismail Haniyeh, au cœur de la capitale iranienne, Téhéran.
L’incident a suscité des informations selon lesquelles Israël aurait envisagé de tuer Haniyeh lors de sa visite à Istanbul en avril dernier, mais a abandonné l’idée à la dernière minute. L’assassinat de Haniyeh a rappelé la menace d’Israël à la fin de l’année dernière de tuer les dirigeants du mouvement où qu’ils se trouvent, en particulier au Liban (Beyrouth), en Turquie et au Qatar, même si cela prendrait des années.
À l’époque, la Turquie a immédiatement réagi avec force en mettant en garde l’ennemi israélien contre les répercussions d’une telle décision, car elle aurait de « graves conséquences », sachant que le chef du Hamas, Saleh al-Arouri, résidait en permanence en Turquie avant de s’installer au Liban, où il a été assassiné plus tôt cette année dans la banlieue sud de Beyrouth.
Par conséquent, l’assassinat de Haniyeh a lourdement frappé les dirigeants et les courants islamiques en Turquie, car Erdogan a fermement condamné l’assassinat, affirmant que « la barbarie sioniste, comme elle n’a pas atteint ses objectifs jusqu’à aujourd’hui, ne les atteindra jamais » et qu’« une position plus forte du monde islamique, en coopération avec l’humanité, mettra fin au terrorisme israélien qui ravage notre région ».
Erdogan a déclaré, lors d’un appel téléphonique avec son homologue américain, Joe Biden, que « l’administration du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a montré à chaque étape qu’elle ne voulait pas parvenir à la paix et à un cessez-le-feu à Gaza », soulignant que l’assassinat de Haniyeh « a porté un coup dur aux efforts de cessez-le-feu, et qu’Israël s’efforce d’étendre le conflit en cours à Gaza à toute la région », selon un communiqué publié par la présidence turque.
L’accusation du ministre des Affaires étrangères Haqan Fidan selon laquelle Netanyahu voulait « étendre la guerre » est allé encore plus loin en disant : « Ce n’est pas le Hamas ni le Hezbollah qui ont créé la résistance, mais l’expansionnisme israélien qui a créé la résistance contre lui. » « Les Palestiniens veulent rester sur leur terre, et ce n’est pas de l’hostilité envers Israël. Mais ce dernier veut continuer à voler des terres et à violer toute moralité », a-t-il déclaré, accusant Netanyahu de vouloir prendre les États-Unis en otage et les obliger à le soutenir dans toute guerre qu’il voudrait déclencher.
Il convient également de noter qu’après avoir refusé de prononcer un discours devant le parlement turc pour protester contre la rencontre d’Erdogan avec Ismail Haniyeh en avril dernier, le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas est revenu après l’incident pour accepter de prononcer le discours le 14 janvier, selon le président du parlement turc, Numan Kurtulmuş.
Fait remarquable, il y a eu un discours du leader kurde Selahattin Demirtaş à Ismail Haniyeh depuis sa prison d’Edirne, où il a condamné le « crime lâche » et a déclaré que Netanyahu avait « franchi toutes les limites de l’immoralité et du mépris ». Demirtaş s’est adressé à Haniyeh en disant : « Chaque vie qui passe par la résistance à l’injustice est précieuse et mérite le respect. »
Dans ce contexte, les menaces d’Erdogan de « rentrer en Israel » ont soulevee des reactions favorables et d’autres reservees et des commentaires chez certains grands auteurs. Le président turc a obtenu un soutien totale de la part de son partenaire le chef du Parti du mouvement national Dolat Bahtcheli qui a dit : « Tous les scénarios sont sur la table, politique, stratégique et militaire. Il faut faire comprendre aux autres que la Turquie n’est pas un pays que l’on peut prendre à la légère ».
Pour sa part, Alane Oyman , l’ex-dirigeant du Parti du peuple républicain a écrit dans le quotidien Cumhuriyet qu’Erdogan répète souvent ce refrain « nous allons entrer une nuit, à l’improviste » qu’il utilise pour menacer les pays avec lesquels il est en tension. Mais Oyemen a rappelé que « la décision de faire la guerre n’est pas une décision personnelle, car selon l’article 92 de la Constitution, elle est prise au Parlement et ses justifications doivent être compatibles avec la légitimité internationale ». Et de faire remarquer « qu’il y a une exception, lorsque le Parlement est en vacances annuelles, ce qui est le cas.»
« Bien que cela donne au président le pouvoir de décider de la guerre, mais elle ne doit pas être prise sans consulter tout le monde dans toute décision à cet égard et de demander aux députés de rester à Ankara pendant cette période. La décision dans les circonstances juridiques actuelles (deuxième alinéa de l’article 92) est exclusivement du ressort du Président de la République en raison de l’entrée du Parlement dans ses vacances d’été».
Le titre « Barbarie sioniste » a presque dominé la plupart des journaux turcs, alors qu’il y avait beaucoup d’analyses à cet égard. Murad Yetkin a avancé trois possibilités pour l’assassinat de Haniyeh : « soit avec un drone ou un avion qui a attaqué son appartement, soit via un travail intérieur avec un missile tiré sur lui, soit en posant une bombe qui a explosé à distance. Dans la première possibilité, le lancement à longue distance n’est possible qu’avec l’aide d’avions pour ravitailler l’avion attaquant, ou le lancement depuis des territoires voisins dont l’Azerbaïdjan qui n’est qu’à 300 kilomètres et le Turkménistan à plus de 200 kilomètres. »
Mohamed Ali Güler a écrit dans le journal Cumhuriyet que trois objectifs étaient derrière l’assassinat du chef du Hamas : « Premièrement, pour que Netanyahou reste au pouvoir à tout prix et maintient les Palestiniens sous pression militaire ; deuxièmement, l’assassinat de Haniyeh contre l’Iran a pour but d’envoyer un message à Téhéran en particulier, et d’attirer les USA dans une guerre régionale en la provoquant, à un moment où elle ne veut pas être entraînée dans cette guerre. Le troisième objectif est de changer la direction du Hamas afin qu’elle soit dirigée par quelqu’un qui n’a pas d’expérience importante ».
Dans le même journal, Barış Turkoglu estime que « l’assassinat de Haniyeh reflète deux choses : premièrement, l’incursion du Mossad à Téhéran ; deuxièmement, la possibilité de franchir les frontières internationales de l’Iran ». Il a souligné que « les rapports judiciaires turcs sur la découverte de cellules du Mossad en Turquie indiquaient qu’il travaillait à collecter des informations en premier en Turquie par l’intermédiaire de personnes et via Internet. Le bureau du procureur général a indiqué qu’Israël assassinera des personnalités palestiniennes, y compris Haniyeh, en Turquie. »
Selon Mustafa Karaoglu dans le journal Décision, « avec l’assassinat de Haniyeh à Téhéran, Israël a dépassé toutes les limites immorales. Elle veut dire au monde que moi seul a le privilège de choisir des cibles des assassinats. Mais en fin de compte, ils ne veulent qu’une chose de ces actions, c’est humilier le monde musulman et montrer l’impuissance de ses dirigeants.
Fahim Tachkine a déclaré dans la Gazette Douar qu’« Israël veut dire qu’aucun endroit ne sera sûr pour l’axe de la résistance. Il y a de nombreuses possibilités sur la façon dont Haniyeh a été tué, y compris : cela s’est-il fait par le biais de drones qui ont décollé depuis le Kurdistan d’Irak ? Ou des avions qui ont traversé l’espace aérien irakien ? Mais comment a-t-il été localisé, par des espions ou par la trahison de l’un de ses compagnons ?.»
Par D. Mohammad Noureddine
Source: Traduit par notre rédaction du quotidien libanais al-Akhbar.
Source: Média