C’est une véritable manigance à laquelle se livre la nouvelle administration américaine de Joe Biden sur trois questions essentielles qui concernent le Moyen-Orient. En voulant s’afficher différente de la précédente, celle de Donald Trump, elle se démarque surtout par son discours qui ne trompe que les dupes.
Lors d’une interview le lundi 8 février sur la CNN, cette manigance s’est manifestée dans toute sa duplicité par les réponses données par le secrétaire d’État américain Antony Blinken à des questions sur l’occupation du plateau du Golan syrien par ‘Israël’, sur l’accord nucléaire avec l’Iran, et sur les accords de normalisation entre les pays arabe et l’entité sioniste.
Dans le premier dossier, Blinken s’abstient d’un côté de s’exprimer sur la décision prise en 2019 par l’ex-président américain Donald Trump dans laquelle il reconnait cette annexion. De l’autre, il refuse d’ôter cette reconnaissance. Et il soutient que « le contrôle du Golan par ‘Israël’ était très important pour sa sécurité dans les conditions actuelles. »
« Tant qu’Assad est au pouvoir en Syrie, tant que l’Iran est présent en Syrie et tant qu’il y a les milices soutenues par l’Iran – tout cela représente une menace pour la sécurité d’Israël. De ce fait, le contrôle du Golan relève d’une importance réelle pour la sécurité d’Israël », selon ses propres termes, cités par les médias israéliens.
En refusant d’annuler cette reconnaissance, Blinken se démarque à peine de la politique du prédécesseur de Joe Biden. Si ce n’est qu’il utilise tout juste des moyens plus sournois : en justifiant l’annexion par la présence du pouvoir syrien, celle de l’Iran et des mouvements de résistance.
Une manigance dont les Américains et les Israéliens sont les champions, axée sur la présentation de l’acte d’agression comme étant un acte de défense.
Même hypocrisie sur la question iranienne. Car aucun changement non plus par rapport à la politique de Trump. La nouvelle administration veut elle aussi modifier l’accord nucléaire et y inclure les mêmes dispositions proposées par la précédente. Avec un petit plus dans le discours.
« Si l’Iran respectait ses obligations, nous ferions la même chose, puis nous travaillerons avec nos alliés pour essayer de construire un accord plus durable et plus large comportant les questions du programme balistique et des actions déstabilisatrices dans la région qui doivent également être abordées, » a réitéré une fois de plus Blinken lors de l’interview avec la CNN.
En exigeant que l’Iran retourne d’abord à ses engagements avant que Washington ne respecte les siennes, le nouveau locataire de la Maison blanche refuse de rétablir la confiance minée par le renoncement de son prédécesseur à l’accord, et réclamée si justement par les responsables iraniens. Il s’attelle pour jeter la balle dans le camp iranien, afin de lui attribuer l’échec du non-retour à l’accord et d’avoir manqué à son engagement électoral.
Biden semble même emprunter à Trump la politique des déclarations contradictoires qui avaient marqué son administration et son mandat. Après avoir déclaré à la CBS news que les États-Unis ne lèveront pas les sanctions imposées à l’Iran, la porte-parole de la Maison Blanche est sorti pour dire qu’il n’a pas dit cela exactement et que sa position est inchangée.
Concernant les accords de normalisation signés entre l’entité sioniste, les Emirats arabes unis et le Bahreïn, c’est toujours la même adhésion aux efforts de Trump, un peu plus franchement, lorsqu’il dit lors de l’interview que « c’est un pas en avant important ».
« Mais cela ne signifie pas que les défis entre Israël et les Palestiniens disparaissent. Et nous devons donc nous y engager. Mais en premier lieu, les deux parties concernées doivent d’abord s’y engager », semble-t-il objecté.
Feignant un effort d’intérêt pour le sort des Palestiniens, il ne fait que les placer et les Israéliens, c’est-à-dire la victime et le bourreau, sur le même pied d’égalité. Un refus des Palestiniens de faire davantage de concessions aboutirait à leur imputer la responsabilité de la persistance des défis. Une manœuvre qui n’a rien de nouveau non plus.
Même procédé de feinte sur la question yéménite : après avoir déclaré qu’elle voudrait mettre fin à la guerre contre ce pays, et stopper les ventes d’armes à l’Arabie saoudite, l’administration Biden jette la balle dans le camp yéménite. Elle veut que le gouvernement de Sanaa arrête la guerre en premier, alors que son pays en est la victime. S’il refuse, elle s’estimera dans son juste droit de ne plus exécuter ses engagements et en imputera la responsabilité à Ansarullah.
Constat plus que flagrant: dans les faits, concernant les questions du Proche-Orient, deux semaines après son investiture, Biden est pour Trump ce que Dupond est pour Dupont, dans la bande dessinée de Tintin. La démarcation dans son discours étant en fait le « je dirais même plus » !!
Source: Médias