Les forces pro-turques s’efforcent lundi de consolider leur emprise sur la ville d’Afrine, largement désertée et théâtre de scènes de « chaos », après deux mois d’une offensive militaire d’Ankara qui pourrait sensiblement modifier l’équilibre des forces dans le nord de la Syrie en guerre.
La grande ville kurde, vidée de ses dizaines de milliers d’habitants, a été le théâtre dimanche de scènes de pillage par des combattants pro-turcs, condamnées par des responsables kurdes et de l’opposition syrienne.
Des actes similaires se sont poursuivis lundi matin, selon un correspondant de l’AFP et l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH). « C’est le chaos généralisé », a ajouté l’ONG, qui dispose d’un vaste réseau de sources sur le terrain.
Parallèlement, les forces turques et leurs supplétifs syriens ratissent la ville, arrachée la veille à la milice kurde des Unités de protection du peuple (YPG) au terme de près de deux mois de combats.
D’après un correspondant de l’AFP, des supplétifs syriens – qui appartiennent à l’Armée syrienne libre, ASL, ndlr- ont marqué sur la devanture des boutiques et les façades des maisons le nom de leur faction. Des opérations de déminage sont également menées, selon l’OSDH.
‘Zone d’influence’ turque
Ankara avait lancé le 20 janvier son offensive dans l’enclave kurde d’Afrine pour chasser de sa frontière la milice des YPG, ce qui est désormais chose faite.
Les violences ont poussé à l’exil quelque 250.000 civils, a souligné l’OSDH, selon qui plus de 1.500 combattants kurdes ont été tués durant l’offensive, ainsi que 400 rebelles alliés à la Turquie. Ankara a de son côté fait état de 46 soldats tués dans ses rangs.
A plusieurs reprises, le président Recep Tayyip Erdogan a menacé d’élargir cette opération dans le nord syrien vers d’autres territoires kurdes, notamment Minbej, où sont stationnées des troupes américaines.
La conquête d’Afrine constitue d’ores et déjà un tournant pour Ankara, qui consolide son rôle dans un conflit opposant sur plusieurs fronts des belligérants soutenus par des puissances étrangères.
« C’est une grande victoire pour Erdogan », dit l’expert sur la Syrie Fabrice Balanche, confirmant que la Turquie construit « une zone d’influence dans le nord » syrien.
Ankara a toujours vu d’un mauvais œil l’autonomie relative grignotée par les Kurdes de Syrie à la faveur du conflit syrien, et considère la milice des YPG comme « terroriste », même si cette faction est alliée à Washington.
En termes d’images, les scènes de pillages dimanche ont toutefois été impressionnantes, suscitant de vives réactions.
Des correspondants de l’AFP ont vu des magasins saccagés, des combattants chargeant pêle-mêle dans des pick-up cartons de nourriture, chèvres, couvertures, et même des motos empilées les unes sur les autres, avant de quitter la ville.
Source: Avec AFP