Confronté à une mobilisation populaire sans précédent, le gouvernement libanais a adopté lundi une série de réformes ambitieuses longtemps attendues.
A l’issue d’un conseil des ministres extraordinaire, le Premier ministre Saad Hariri a annoncé devant la presse l’adoption par la coalition gouvernementale qu’il dirige de « mesures essentielles et nécessaires ».
Il a notamment promis un « budget 2020 sans impôts supplémentaires pour la population », une baisse de 50% des salaires du président et des ex-présidents, des ministres et des députés, ainsi que de nouvelles taxes sur les banques.
Hariri a également annoncé des mesures rapides de lutte contre la corruption et a dit soutenir la revendication de législatives anticipées, réclamées par des foules réunies dans un élan inédit d’unité nationale dans ce petit pays multiconfessionel du Proche-Orient.
S’adressant à la foule rassemblée dans les rues pour une 5e journée consécutive, le Premier ministre a fait profil bas. « Ces décisions n’ont pas été prises pour vous demander de cesser de manifester ou d’exprimer votre colère », a-t-il dit.
« Vous êtes la boussole, c’est vous qui avez fait bouger le Conseil des ministres, c’est votre mouvement qui a conduit aux décisions », a encore dit M. Hariri.
En début de soirée, des dizaines de manifestants se sont rassemblés devant la Banque du Liban (BDL), la banque centrale du pays. « La BDL représente le pouvoir politique, la corruption et les mauvaises politiques » publiques, a lancé à l’AFP l’un des manifestants, Mohamad Nahlé.
Dans un pays en partie paralysé, les banques seront fermées mardi pour le 4e jour.
La colère populaire avait éclaté jeudi avec l’annonce surprise d’une nouvelle taxe sur les appels effectués via WhatsApp. La mesure a été rapidement annulée mais la contestation a continué de grandir.
La mobilisation a atteint un pic dimanche, jour de repos, avec des centaines de milliers de manifestants dans les rues de tout le pays, du sud à majorité chiite aux villes chrétiennes, sunnites ou druzes du nord et de l’est.
Ces dernières années, le quotidien a continué de se dégrader pour les Libanais, toujours confrontés à d’incessantes coupures d’eau et d’électricité 30 ans après la fin de la guerre civile (1975-1990). Plus du quart de la population vit sous le seuil de pauvreté, d’après la Banque mondiale.
Dans son plan, M. Hariri a également prévu l’adoption, dans un délai de trois semaines, d’une première série de projets d’infrastructures programmés dans le cadre de la Conférence d’aide internationale au Liban (CEDRE) organisée en avril 2018 à Paris.
Le Liban s’était alors engagé à mener des réformes structurelles en contrepartie d’une aide de 11 milliards de dollars. Mais, faute de réformes, les fonds promis n’ont toujours pas été versés.
Pour l’économiste libanais Ghazi Wazni, ces annonces devraient au moins être appréciées par le Fonds monétaire international (FMI) et les agences de notation, qui ont récemment révisé la note sur la dette libanaise. « Elles sont globalement en phase avec les engagements du Liban pris à Paris », a-t-il dit à l’AFP.
Les mesures annoncées comportent également un volet social, avec l’adoption d’ici la fin de l’année d’un nouveau régime de protection et des mesures de soutien aux ménages les plus démunis.
Source: Avec AFP