Les forces irakiennes s’acharnaient jeudi à défaire les derniers jihadistes wahhabites retranchés dans la vieille ville de Mossoul, où jusqu’à 20.000 civils restent pris au piège des combats et sont en « grand danger ».
Plus de huit mois après le début de l’offensive pour reprendre Mossoul, la deuxième ville d’Irak, les autorités militaires et politiques du pays ont affirmé que la « victoire » était désormais très proche face à Daech, en passe de subir son plus important revers depuis 2014.
Le groupe wahhabite ultraradical responsable d’atrocités dans les zones sous son contrôle et d’attentats meurtriers à travers le monde avait conquis en juin 2014, à son apogée, la cité septentrionale et de vastes pans de territoire en Irak. Aujourd’hui, il ne contrôle plus qu’un petit réduit dans l’ouest de Mossoul et quelques zones ailleurs dans le pays.
Dans son dernier carré dans la vieille ville dévastée de Mossoul, l’EI continue d’opposer une résistance farouche en lançant notamment ses kamikazes, dont des femmes, contre les forces irakiennes.
Selon la télévision libanaise al-Mayadeen TV, les forces irakiennes ont liquidé 27 kamikazes depuis l’aube de ce jeudi. Elles ont aussi libéré une jeune fille yazidite de 16 ans qui avait été kidnappée dans la province de Sinjar par Daech puis réduite à l’esclavage.
De même, elles ont évacué les membres de familles des miliciens de Daech , dont leurs épouses et leurs enfants et les ont emmenés vers les camps des déplacés.
Des responsables de l’appareil de lutte contre le terrorisme ont indiqué que plus de 200 miliciens de Daech ont péri dans la bataille de la vieille ville de Mossoul durant ces deux derniers jours . Al-Mayadeen avait évoqué la mort de 3, puis de 38 chefs de Daech hauts placés.
Destructions
Malgré la fuite de dizaines de milliers de civils, « il pourrait y avoir encore jusqu’à 15.000 civils, peut-être même 20.000, dans les dernières poches de la vieille ville », a déclaré jeudi à l’AFP Lise Grande, la coordinatrice humanitaire de l’ONU pour l’Irak.
Les civils sont « en grand danger, ils sont pris dans les bombardements et les échanges de tirs. Les jihadistes les ciblent s’ils cherchent à partir », selon Mme Grande. « Et leurs conditions de vie sont terribles ».
En plus de huit mois, quelque 915.000 habitants ont fui Mossoul, dont environ 700.000 sont toujours déplacés, a-t-elle ajouté. Ce chiffre « dépasse notre pire scénario ».
Mme Grande a évoqué des destructions énormes dans l’ouest du dernier grand bastion urbain de l’EI en Irak. « Il y a 44 quartiers résidentiels, six ont été complètement détruits, 22 partiellement et 16 peu détruits ».
Les forces irakiennes sont désormais à environ 200 mètres du fleuve Tigre, contre lequel sont acculés les derniers jihadistes takfiristes retranchés dans des pâtés de maisons. Elles se déplacent par de petits passages aux trous creusés dans les murs des maisons, ou les fenêtres.
« Nos ennemis utilisent des kamikazes à pied, surtout des femmes. Ils attendent également dans les maisons et se font exploser ou ouvrent le feu quand nous y entrons », a indiqué un commandant irakien à l’AFP.
Les civils en fuite sont fouillés pour s’assurer qu’aucun kamikaze ne s’est glissé parmi eux.
Mardi, très confiant, le Premier ministre Haider al-Abadi avait félicité par avance les Irakiens « pour avoir réussi une victoire majeure à Mossoul ». Les commandants sur le terrain se disent près de la fin.
224 civils tués à Raqqa
La reconquête de Mossoul constituerait la plus importante victoire de l’Irak face à l’EI depuis le début des contre-offensives militaires qui ont drastiquement réduit les territoires aux mains du groupe wahhabite.
De plus, Mossoul a une portée très symbolique pour l’EI, son très discret chef Abou Bakr al-Baghdadi y ayant fait son unique apparition en juillet 2014.
La Russie a affirmé en juin avoir probablement tué Baghdadi dans une frappe en Syrie mais personne n’a confirmé sa mort.
Sur le front syrien, des combattants de la milice à majorité kurde des Forces démocratiques syriennes (FDS), sous la couverture aérienne de la coalition internationale, tentaient de progresser dans la vieille ville de Raqqa, dans l’est de la cité encore contrôlée à 70% par l’EI, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).
« Les jihadistes font exploser des voitures pour repousser leurs adversaires », a précisé l’OSDH, en soulignant que les FDS avaient reçu un nouveau lot d’armements américains -véhicules blindés et armes.
Les civils continuent de payer le prix fort de cette bataille. Au moins 224 d’entre eux ont péri dans frappes de la coalition internationale depuis l’entrée le 6 juin des FDS à Raqa, selon l’ONG. Durant la même période, 311 jihadistes et 106 membres des FDS sont morts.
Profitant de la guerre en Syrie et de l’instabilité politique et sécuritaire en Irak, l’EI s’est emparé en 2014 de vastes territoires dans ces deux pays, faisant de Mossoul et Raqqa les principaux fiefs de son « califat » aujourd’hui en lambeaux
Sources: AFP, Al-Mayadeen TV