Par Ivan Kesic
L’Iran a officiellement dévoilé, le mardi 6 juin, son premier missile balistique hypersonique de fabrication nationale, rejoignant le petit, mais puissant, cercle des quatre pays qui ont accompli cet exploit extraordinaire.
La cérémonie de dévoilement qui s’est tenue à Téhéran a eu lieu en présence du président iranien Ebrahim Raïssi et des hauts responsables militaires, dont le commandant en chef du Corps des gardiens de la Révolution islamique (CGRI), le général de division Hossein Salami et le commandant de la Force aérospatiale du CGRI, le général de brigade Amir-Ali Hajizadeh.
Le missile peut se déplacer à une vitesse allant de Mach 13 à 15, il a une portée de 1 400 km, dispose d’une buse secondaire mobile et utilise des propulseurs solides qui permettent une grande maniabilité.
Le Leader de la République Islamique en Iran, l’Ayatollah Sayed Ali Khamenei, l’a baptisé Fattah qui se traduit par « le Conquérant ».
Cette vitesse, ainsi que les buses mobiles qui permettent au missile de manœuvrer dans toutes les directions à la fois, dans et hors de l’atmosphère terrestre, le rend insensible à l’interception par tous les systèmes anti-missiles existants.
Décrivant la production du missile de nouvelle génération comme un « pas de géant » dans l’industrie iranienne des missiles, le général de brigade Hajizadeh a précisé que le missile avait subi tous les tests sans aucun problème.
Qu’est-ce qui rend cet exploit unique ?
Avant l’Iran, seuls trois pays maîtrisaient la technologie pour fabriquer des missiles hypersoniques opérationnels, à savoir la Russie, la Chine et l’Inde. Leurs modèles diffèrent par les plateformes de lancement, la portée, la charge utile et la technologie hypersonique elle-même.
Très peu d’autres pays, y compris les États-Unis, ont des programmes de développement hypersonique à long terme, cependant, à ce jour sans succès ni déploiement opérationnel.
Par exemple, le budget 2024 de l’armée de l’air américaine ne comprend que des provisions pour le développement technologique, mais pas pour l’achat ou la mise en service de missiles hypersoniques.
Compte tenu du modèle présenté et des spécifications susmentionnées, le missile iranien Fattah diffère de tous les missiles hypersoniques existants, opérationnels ou en développement.
Le commandant de la Force aérospatiale du CGRI, le général de brigade Amir-Ali Hajizadeh, a déclaré que le missile dévoilé, le mardi 6 juin, présente de nombreuses caractéristiques uniques.
« Le Fattah ne peut être détruit par aucun autre missile en raison de la façon dont il se déplace dans différentes directions et à différentes altitudes », a-t-il déclaré.
Lors de la cérémonie de dévoilement du missile, le président Raïssi a affirmé que l’Iran a su développer par ses propres moyens, ses industries de la défense et des missiles. Les progrès militaires sont « une source de sécurité et de paix » pour la région.
« Le pouvoir de dissuasion de l’Iran est la source de stabilité et de paix pour les pays de la région », a-t-il réaffirmé.
Comment le monde a-t-il réagi ?
Ces dernières années, les médias occidentaux ont sous-estimé les acquis technologiques iraniens. Cependant, cette fois, les réactions ont été beaucoup plus mesurées et équilibrées.
Les drones iraniens, autrefois décrits comme des « jouets inutiles » par les médias occidentaux et les soi-disant experts militaires, sont aujourd’hui devenus une source de consternation pour l’Occident, si bien que les États-Unis ont imposé une série de sanctions à l’Iran.
Les radars et les systèmes anti-aériens de l’Iran ont également fait l’objet de moqueries jusqu’en juin 2019, lorsque le drone le plus sophistiqué de surveillance américain RQ-4A Global Hawk a été abattu par le système anti-missile Khordad-3 incitant les États-Unis à durcir les sanctions contre le pays.
En réaction à la fabrication de Fattah, le département américain du Trésor a imposé des sanctions à un réseau de sept individus et aux six entités en Iran, en Chine et à Hong Kong, évoquant des liens avec le programme de missiles balistiques iranien.
Le responsable du Conseil de sécurité nationale des États-Unis, John Kirby, a dit que le gouvernement de Joe Biden « a été très ferme pour repousser les activités déstabilisatrices de l’Iran dans la région, y compris le développement d’un programme de missiles balistiques amélioré ». Cette réaction montre l’incapacité face aux prouesses militaires croissantes de l’Iran.
Le ministre israélien des Affaires militaires, Yoav Gallant, a tenté de minimiser l’importance du Fattah, alléguant qu’« Israël aurait toujours une solution pour l’affronter ».
Radio Free Europe, un média de propagande occidental, a cité un « expert » disant que Fattah « ne semble pas être aussi sophistiqué que les missiles hypersoniques développés par les États-Unis et la Chine ».
Le rapport cite un autre « expert » disant qu’il y a « des questions quant à savoir s’il est vraiment capable d’atteindre avec précision sa cible à la vitesse très élevée qui a été revendiquée ».
Les stratèges militaires avec lesquels le site anglophone iranien Press TV s’est entretenu ont déclaré que ces soi-disant « commentaires d’experts » sur le premier missile hypersonique iranien montrent que « certains Occidentaux continuent de vivre dans le déni » de la puissance militaire de l’Iran, qui a « considérablement augmenté face aux sanctions ».
Où en est l’Iran ?
Bien que la technologie hypersonique soit extrêmement sophistiquée car elle implique des moteurs de missile avancés, des matériaux résistants aux températures élevées et un guidage complexe, il ressort des réactions qu’il y a peu de scepticisme quant aux capacités de Fattah.
L’une des réactions à la nouvelle prouesse de l’Iran est le dernier rapport de l’Institut australien de politique stratégique (Australian Strategic Policy Institute, ASPI), parrainé par le gouvernement américain, qui suit le développement mondial de 44 domaines technologiques les plus avancés, cruciaux pour les percées scientifiques à l’avenir.
Le rapport de l’ASPI a classé l’Iran parmi les cinq premiers pays des 44 technologies suivies, devant le Japon, la Russie et la France, ainsi que le neuvième du classement général pour prédire les dix premières puissances mondiales futures.
L’une de ces technologies est les moteurs d’avions avancés, y compris les moteurs hypersoniques, où l’Iran se classe au cinquième rang.
L’Iran se classe également au cinquième rang dans les domaines des matériaux et de la fabrication à l’échelle nanométrique, des revêtements et des matériaux composites avancés, ainsi qu’au quatrième rang dans le domaine des matériaux intelligents.
En outre, l’Iran a une expérience considérable des missiles balistiques de haute précision, éprouvée dans la pratique contre des bases terroristes en Irak et en Syrie, ainsi que contre des cibles mobiles dans le golfe Persique.
Le commandant en chef du CGRI, le général de division Salami, a annoncé en février que l’Iran développait également des missiles de croisière supersoniques, ce qui constituera un autre pas de géant dans la technologie des missiles du pays en dépit des sanctions paralysantes.
Malgré la rhétorique occidentale, l’Iran estime que son programme de missiles est de nature pacifique et défensive.
Source: Avec PressTV