La 15ème rencontre internationale du processus d’Astana sur la Syrie a repris ses travaux dans la ville russe de Sotchi. Malgré les critiques existantes dudit processus de la part de certains acteurs, notamment occidentaux – cette formule reste jusqu’à maintenant la plus efficace sur le plan d’actions concrètes pour la République arabe syrienne.
Le règlement politique en Syrie et le sort du Comité constitutionnel étaient devenus les principaux sujets des premières négociations depuis plus d’un an dans le cadre du «format d’Astana», qui ont été déplacées du Kazakhstan dans la cité balnéaire russe de Sotchi en raison de la pandémie du Covid-19. Si jusqu’à présent, la mission principale de la plateforme d’Astana était de résoudre les questions sur le terrain, désormais les accents ont connu une certaine évolution.
Pour rappel, les pays garants de ces négociations entre le gouvernement syrien et les représentants de l’opposition dite modérée sont la Russie, l’Iran et la Turquie. Avec le Liban, l’Irak et la Jordanie qui participent aux travaux en qualité d’observateurs. La délégation onusienne participe également aux rencontres de la plateforme.
Avant le début de cette 15ème rencontre internationale du processus d’Astana, le représentant spécial du président russe pour la Syrie Aleksandre Lavrentiev a noté que les participants «comptent donner une certaine impulsion – non pas au travail du processus d’Astana en tant que tel, mais plutôt au processus de règlement syrien».
Si la situation sur le terrain a effectivement radicalement évolué au cours des dernières années – avec une reprise sous contrôle de la grande partie du territoire syrien par le gouvernement et la destruction des principales forces terroristes, les défis se maintiennent dans la République syrienne, et ce pour plusieurs raisons. L’une d’elles étant la province d’Idlib, dont une partie échappe encore au contrôle du gouvernement. Mais plus que cela encore, ladite zone continue d’abriter un nombre assez important d’éléments terroristes, notamment affiliés à Al-Qaida (bien que leur affiliation ne soit plus aussi «officielle» qu’auparavant). A ce sujet, le principal problème pour Moscou reste la démarcation entre l’opposition armée syrienne modérée et ces groupes terroristes, présents côte à côte.
Les responsabilités sur cette démarcation et l’élimination à Idlib de ces éléments terroristes incombent justement à l’opposition armée syrienne représentée dans les pourparlers d’Astana, ainsi qu’à leur soutien turc. Il faut reconnaitre que jusqu’à maintenant pratiquement rien n’a été fait en ce sens et les dits éléments continuent de «cohabiter» dans la partie d’Idlib n’ayant pas encore été reprise par Damas.
Mais ce n’est pas tout. Les autres problèmes majeurs étant la présence étasunienne illégale sur le sol syrien, en alliance avec une partie des représentants kurdes. Ainsi que l’exploitation des gisements pétroliers dans cette zone par des compagnies US – là aussi en totale illégalité. Sans oublier la base étasunienne d’al-Tanf dans le sud du pays – une zone qui a connu une certaine activation récente des éléments de Daech.
Enfin les sanctions washingtoniennes à l’encontre de Damas continuent de fragiliser la situation humanitaire et le plein lancement de la reconstruction du pays. Bien que cela ne soit aucunement une surprise – l’objectif initial des USA en Syrie n’a jamais été la stabilisation du pays, mais bien la tentative (échouée) de faire tomber le gouvernement légal, y compris si cela devait se produire par une multiplication du chaos et du terrorisme – aussi bien en Syrie, que dans toute la région concernée.
La vision de Damas et de Moscou est également partagée par l’Iran, l’autre principal allié de la République arabe syrienne. D’ailleurs et dans le cadre des travaux à Sotchi, la délégation de la Syrie, présidée par Aymane Soussane, ministre adjoint des Affaires étrangères et des Expatriés, a tenu une réunion avec la délégation iranienne présidée par le haut assistant du ministre des Affaires étrangères pour les affaires politiques spéciales, Ali Asghar Khaji.
Les points de vue des deux parties étaient identiques quant à la nécessité de poursuivre l’action conjointe à tous les niveaux, notamment celui de la lutte contre le terrorisme – jusqu’à son élimination de tout le territoire syrien. Les deux responsables ont par ailleurs mis l’accent sur la responsabilité de la communauté internationale de mettre fin à la politique d’imposition des mesures coercitives unilatérales, suivie par certains pays occidentaux et qui visent les peuples, ainsi que sur la nécessité de ne pas politiser le dossier des aides humanitaires et ne pas permettre en même temps l’accès de ces aides aux réseaux terroristes. Les représentants syrien et iranien ont également insisté sur l’importance du respect des références de ce processus, notamment en ce qui concerne le refus de toute intervention étrangère ou la fixation des calendriers fabriqués.
Dans toute cette situation, une chose demeure certaine: la détermination de Damas, comme de Moscou et Téhéran de trouver des solutions pour la pleine relance de l’économie syrienne et la reconstruction du pays, ainsi que l’élimination des derniers éléments terroristes encore présents sur le sol syrien. Si la Turquie ne partage pas pleinement le même agenda et continue de retarder, entre autres, la résolution des problèmes dans la province d’Idlib, sa participation dans le processus d’Astana reste certainement justifiée. En ce sens en qualité de garants dudit processus, le trio Russie-Iran-Turquie a été jusqu’à présent indéniablement plus efficace que toutes les autres plateformes promues par les pays occidentaux et affiliés. Confirmant par la même occasion que l’interaction eurasienne reste sans aucun doute la meilleure des options dans la résolution de nombreuses crises régionales et internationales.
Pour ce qui est des USA et de leurs alliés occidentaux, il serait certainement juste de dire que leur rôle jusqu’à maintenant a été surtout d’entraver les processus en cours. Et ce pour deux raisons principales – la première étant l’échec du projet géopolitique initial de faire tomber le gouvernement officiel syrien. La seconde étant le fait d’avoir été écartés des questions majeures visant le règlement en Syrie.
Mais malgré les obstacles mis sur le chemin des partisans de la multipolarité – les choses se poursuivent au détriment des nostalgiques de l’unipolarité révolue. Certes, plus longuement que cela aurait été possible. Mais il demeure peu probable que l’Occident politique puisse faire quoi que ce soit dans la défaite évidente subie dans le cadre du scénario si souhaité au départ par l’establishment occidental en terre syrienne.
Par Mikhail Gamandiy-Egorov
Source : Observateur continental
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