L’amiral Charles Richard, chef du Commandement stratégique des États-Unis, a fait une évaluation approfondie de l’après-Guerre froide dans un article paru dans le magazine scientifique de l’US Naval Institute et dont certains extraits ont été repris par le Washington Times. Il y estime que l’époque où les États-Unis pouvaient être certains qu’une confrontation directe avec une puissance nucléaire rivale serait impossible est révolue.
Selon le Washinton Times, l’amiral Richard a affirmé dans son évaluation : « Il est fortement possible, au cas où la Russie ou la Chine sentent avoir échoué dans un conflit conventionnel, qu’un conflit régional se transforme en conflit nucléaire ».
« L’utilisation des armes nucléaires est une vision très réaliste», a-t-il aussi souligné.
Selon le journal américain, le déploiement par la Chine et la Russie de forces stratégiques sur les lignes de front exige que les États-Unis soient plus actifs dans le développement de nouveaux concepts de dissuasion et, si nécessaire, de stratégies de guerre nucléaire.
Selon l’amiral Richard, le fait de contrôler les deux pays par le biais de crises ou, en fin de compte, par une guerre nucléaire est aujourd’hui plus important que jamais.
Ces dernières années, Moscou et Pékin ont investi massivement dans les capacités nucléaires et stratégiques pour contourner la suprématie des États-Unis.
Interrogé par le Washington Times, l’amiral Richard a déclaré que son article avait été écrit en septembre.
« Nous pensions que le concept de dissuasion stratégique fonctionnerait à l’avenir, mais la nature des menaces est en train de changer », a-t-il déclaré, avant d’ajouter : « Nous devons nous préparer au 21e siècle aux menaces multicouches . Les États-Unis doivent jouer un rôle de premier plan. Cependant, peu de stratégies développées répondent à la question de savoir comment maintenir la suprématie américaine. »
Et le responsable américain de poursuivre : « D’une part, un effort unifié est nécessaire dans le processus de lutte contre l’agression russe et chinoise, d’autre part, nous devons considérer qu’atteindre cet objectif exige l’emploi de différents moyens de la lutte. Le Pentagone doit également améliorer les systèmes stratégiques et renforcer les systèmes de commandement et de contrôle et les équipements de la guerre dans le cyberespace. »
L’amiral Richard a ajouté: « La Chine en tant que rival stratégique ne doit pas être sous-estimée, car Pékin transforme l’ordre économique mondial en sa faveur. La Chine poursuit ses avancées technologiques dans tous les domaines et continue à étendre sa force spatiale et ses capacités anti-spatiales. Aujourd’hui, les systèmes spatiaux permettent à la Chine d’identifier et de commander ses forces à travers le monde. En outre, la Chine a déployé ses systèmes d’armes sur les îles contestées de la mer de Chine méridionale».
« Comme les Russes, l’armée de l’air et la marine de l’Armée populaire de libération créent des obstacles pour les forces américaines et alliées opérant dans l’espace aérien et les eaux internationales », a-t-il déclaré.
Investissant massivement dans les forces nucléaires, les missiles balistiques intercontinentaux, a-t-il noté, Pékin est sur le point d’achever un nouveau bombardier de longue portée.
Et d’ajouter : « Les forces stratégiques chinoises ont également reçu de nouveaux systèmes d’alerte rapide et des systèmes de commandement et de contrôle opérationnels. »
«Bien que [la Chine] mène une politique de ‘frappe non nucléaire’ depuis les années 1960, sa capacité avancée lui donne une variété d’options, y compris une utilisation limitée des armes nucléaires et des capacités de première frappe », a-t-il poursuivi.
La dissuasion et le risque d’un conflit nucléaire
L’amiral Richard affirme que deux décennies de concentration sur la lutte contre le terrorisme ont augmenté le risque d’un conflit nucléaire. L’accent mis par les États-Unis sur la lutte contre le terrorisme après les attentats du 11 septembre a coïncidé avec une période où la Chine et la Russie construisaient activement leurs arsenaux nucléaires.
« Au sein du Commandement stratégique américain, nous évaluons comme faible, mais pas impossible la possibilité d’utiliser des armes nucléaires», a-t-il prévenu.
La Russie procède à une «modernisation agressive»
Plus loin, l’amiral Richard a accusé la Russie de moderniser «agressivement» ses forces nucléaires depuis plus d’une décennie à l’aide de nouveaux missiles de courte portée, en affirmant que Moscou crée de nouveaux bombardiers, des missiles balistiques continentaux, des missiles balistiques lancés depuis des sous-marins ainsi que de nouveaux sous-marins nucléaires.
Les systèmes d’alerte et de contrôle ont été modernisés, a-t-il ajouté en poursuivant : « De nouvelles armes stratégiques sont en cours de développement, notamment des engins hypersoniques, des torpilles nucléaires et des missiles de croisière avancés. »
La modernisation des forces nucléaires de la Russie a été réalisée à 70% et sera achevée dans les prochaines années, a-t-il précisé.
Lors du rattachement de la Crimée à la Russie en 2014, le président russe Vladimir Poutine a prôné le renforcement de l’arsenal nucléaire de son pays, rappelle l’amiral Richard, en faisant allusion aux manœuvres menées par les forces russes, avec pour objectif de faire face à la menace des avions et des navires américains, mais aussi aux cyberattaques contre les réseaux de l’administration américaine.
Qualifiant le test d’armes anti-satellite de Moscou de «menace pour les véhicules spatiaux internationaux», l’amiral Richard a conclu que ces mesures montrent la volonté de la Russie de s’engager dans une concurrence « agressive » qui va l’encontre des normes internationales, selon lui.
Source: Avec PressTV