Le président syrien Bachar al-Assad a affirmé que les Etats-Unis vont devoir quitter son pays, n’excluant pas le recours à la force contre les forces kurdes qu’ils soutiennent pour libérer chaque pouce du sol syrien.
« C’est notre terre et c’est notre droit et notre devoir de la libérer. Les Américains doivent partir et ils partiront d’une façon ou d’une autre », a ajouté M. Assad dans une interview à la chaîne de télévision Russia Today, diffusée ce jeudi 31 mai.
« Après la libération d’Alep (nord), par la suite (la ville de) Deir Ezzor et avant cela Homs (centre) et maintenant Damas, les Américains perdent en réalité leurs cartes », a-t-il ajouté.
La Syrie est victime d’une guerre aux ingérences externes depuis que les puissances étrangères, dont les Etats-Unis, la France et les monarchies du Golfe ont militarisé le mouvement de protestation pacifique qui avait éclaté dans la foulée du Printemps arabe en 2011.
« Le seul problème qui reste aujourd’hui en Syrie, c’est les Forces démocratique syriennes (FDS) », a dit le président syrien dont les troupes ont réussi à reprendre plus de 60% du territoire aux groupes terroristes et aux jihadistes takfiriste grâce à l’aide de l’allié russe, de l’Iran, du Hezbollah et d’autres forces volontaires.
« Nous avons deux options pour régler ce problème: Nous avons d’abord ouvert la voie à des négociations car la majorité des membres (des FDS) sont des Syriens. Si cela ne marche pas, nous allons libérer nos territoires par la force. Nous n’avons pas d’autre choix », a-t-il souligné.
C’est grâce au soutien des Etats-Unis que les FDS, une coalition composée principalement de miliciens kurdes des YPG (Unités de protection du peuple kurde), sont parvenus à déloger le groupe wahhabite takfiriste Daech (Etat islamique-EI) de plusieurs régions de Syrie dont son fief de Raqqa, et qu’elles continuent de combattre dans une partie de la province orientale de Deir Ezzor.
Les FDS contrôlent de larges territoires dans le nord et nord-est syrien et sont stationnées sur la rive orientale.
Tandis que les forces gouvernementales syriennes contrôlent la ville de Deir Ezzor, chef-lieu de la province du même nom riche en pétrole, et toute la rive ouest de l’Euphrate.
Des combats inédits ont éclaté fin avril entre ces forces régulières et les FDS dans cette province, dont les zones encore occupées par Daech font l’objet d’une double offensive : un commanditée par Damas et soutenue par l’aviation russe et l’autre par les FDS appuyées par la coalition internationale emmenée par Washington.
Sept ans après le début du conflit, M. Assad a solennellement répété que ses forces « n’abandonneront aucun territoire ». « Si nous n’arrivons pas à récupérer (l’ensemble) du territoire par des accords de réconciliation, nous le ferons par la force ».
Il faut neutraliser la bêtise américaine
Sur un autre plan, M. Assad a affirmé qu’une confrontation russo-américaine avait été évitée de justesse.
« Nous étions près d’une confrontation directe entre les forces russes et celles des Etats-Unis, et heureusement elle a été évitée. Non pas grâce à la sagesse de la direction américaine mais à celle de la direction russe… personne au monde et en premier lieu les Syriens n’a intérêt à ce que cette confrontation se produise. Nous avons besoin de neutraliser la bêtise américaine pour réaliser la stabilité dans notre pays « .
Interrogé justement sur l’insulte que le président américain Donald Trump lui a adressé en le qualifiant « le lion animal », et s’il avait un surnom à lui adresser en échange, il a répondu : « ce n’est pas mon langage. Et je ne peux pas l’utiliser. En revanche c’est son langage à lui. Nous avons un dicton qui dit « la parole reflète la qualité de son auteur » et ces mots sont l’expression de sa personne et ils ne me font ni chaud ni froid ».
L’intervention militaire russe en Syrie est entrée en action à partir de septembre 2015, à la demande de Damas.
« Pas de troupes iraniennes »
Sur la question de l’implication de l’allié iranien dans le conflit et les récentes frappes israéliennes sur des positions militaires présentées comme iraniennes en Syrie, M. Assad a affirmé qu’il n’y avait « pas troupes iraniennes sur notre sol ».
« Nous ne pouvons pas les cacher (les iraniens) et nous n’avons pas honte de dire clairement s’il y en a », a-t-il dit. « Seuls des officiers iraniens aident l’armée syrienne ».
« Ils (Israël) disent avoir attaqué des bases et des camps iraniens. Mais en fait nous avons eu des dizaines de Syriens tués ou blessés, et pas un seul Iranien », a poursuivi M. Assad.
Les réconciliations en premier, sinon la force
Sur la question des réconciliations avec les factions syriennes, le président syrien s’est dit ouvert aux efforts déployés dans ce sens.
« La guerre est ce qu’il y a de pire… Mais parfois on n’a pas d’autre choix avec des gens comme Al-Qaïda, Daech, le Nosra et les autres groupuscules qui ont la même idéologie à l’instar de Jaïsh al-Islam et de Ahrar al-Cham , et qui ne sont pas prêts au dialogue », a-t-il expliqué.
« Le mieux bien entendu est de réaliser les réconciliations, c’est notre plan. Mais lorsque ça ne marche pas, le seul moyen restant est de recourir à la force », a-t-il ajouté.
Le gouvernement syrien a créé depuis le début de la crise un ministère destiné au processus de réconciliation. Il a tourné à pleine vitesse, escortant entre autre toutes les batailles menées pour libérer les régions occupées par les groupes terroristes. Des dizaines de milliers de miliciens ont rendu les armes. Certains se sont rendus aux autorités syriennes et d’autres ont été évacués vers le nord de la Syrie.
Un ou deux fronts sont mieux qu’une dizaine
Justement, l’une des questions du journaliste de RT s’est portée sur le bien-fondé de cette décision d’envoyer les miliciens vers la province d’Idleb, au nord-ouest de la Syrie. « Est-ce que vous planifiez pour former une zone qui soit en dehors du gouvernement syrien? », lui a-t-il aussi demandé.
« Il est impossible que nous puissions laisser une partie du sol syrien en dehors du contrôle du gouvernement. Les terroristes se sont emparés d’Idleb en 2015, avec l’aide de la Turquie. Mais ce sont les factions qui ont été évacuées des villes et des régions (libérées, ndlr) qui ont voulu se rendre vers cette région régie par le front al-Nosra (ex-branche d’Al-Qaïda). C’est la preuve qu’ils ont tous la même idéologie », a répondu M. Assad.
Et de poursuivre : « en outre, et de point de vue militaire, le plan des terroristes et de leurs sponsors a été de disperser les forces de l’armée syrienne afin de répandre ses forces sur l’ensemble des territoires syriens. Ce qui n’était pas bon pour l’armée. Notre plan consiste à les rassembler tous dans une ou deux régions. Lorsqu’on, un, deux, ou trois fronts c’est bien plus facile que d’en avoir des dizaines ».
Toutes les communautés vivent ensemble
Par ailleurs, M. Assad a rejeté les accusations selon lesquelles le pouvoir syrien tuait les gens sur des critères confessionnels, notamment les sunnites. « La preuve c’est que toutes les communautés de la société syrienne sans exception vivent ensemble dans les zones contrôlées par le gouvernement syrien », a-t-il précisé.
« Les auteurs de cette version des faits véhiculée en Occident bien entendu, et dans l’intérieur syrien,…, ont voulu provoquer un clivage communautaire dans la société, pour mieux justifier l’existence d’une guerre civile », a-t-il aussi avancé à ce sujet.
« Israël panique car il perd ses alliés »
Interrogé sur la menace israélienne qui devient de plus en plus pressante, M. Assad a répondu : « depuis notre naissance, je parle de notre génération, nous vivons sous la menace d’une agression israélienne. Ceci fait partie de notre conscient… Depuis des décennies, les Israéliens ont sans cesse recours aux assassinats, aux colonisations dans cette région. Et ils l’ont fait sans menace. Pourquoi cette fois-ci profèrent-ils des menaces de cette façon ? C’est le signe qu’ils paniquent. C’est une sorte de sentiment hystérique car ils perdent leur « bien-aimés », en Syrie, c’est-à-dire le front al-Nosra et Daech ».
Sur l’efficacité des raids israéliens vantée dans les médias occidentaux, M. Assad a révélé que l’une des premières choses que les miliciens ont faites dans le sud syrien a été d’attaquer les bases militaires où était déposée la DCA syrienne. « Cela n’avait rien à voir avec les soi-disant manifestations pacifiques et les forces modérées comme ils les appellent… c’est la preuve qu’Israël était lié d’une façon ou d’une autre à ces terroristes en Syrie »
Selon lui, les défenses antiaériennes syriennes sont dans une situation meilleure grâce au soutien russe.
« Notre seul choix réside dans le perfectionnement de notre defense aérienne. C’est la seule chose que nous pouvons faire et nous sommes en train de le faire », a-t-il précisé.
Sources: AFP, Sana.