C’est la troisième apparition télévisée cette semaine du numéro un de l’organisation Ansarullah, Abdel Malek Houthi. Elle intervient dans un contexte de haute tension avec son allié de circonstances, l’ex-président Ali Abdlallah Saleh, qui semble avoir retourné sa veste, et d’affrontements entre les combattants des deux bords dans la capitale Sanaa. Plus est-il que dans les médias pro saoudiens, il est question que les hommes de Saleh ont conquis d’importants sites gouvernementaux, ce que les houthis ont catégoriquement nié.
Durant le discours de ce samedi soir, M. Houthi n’a pas ménagé le chef du parti du Congrès populaire, l’ex-président yéménite Ali Abdallah Saleh avec lequel était pourtant son allié pour contrer la guerre saoudienne contre le Yémen depuis 2015, le qualifiant de « chef de milices ».
« Les propos de ce chef des milices sont pourris et ce n’est certes pas lui qui peut être garant de la République», lui a-t-il lancé.
« Je vous demande de réviser vos calculs et votre position laide et irresponsable. Les forces de l’offensive considèrent votre position comme un soutien pour eux. Ce qui révèle toute la vérité pour ceux qui ont été induits en erreur », a-t-il ajouté aussi.
La coalition sous commandement saoudien a encouragé la démarche de l’ex-président, affirmant qu’elle « libérera le Yémen » des « milices loyales à
l’Iran ».
Saleh retourne sa veste
Le discours de M. Houthi intervient quelques heures après le discours télévisé prononcé par M. Saleh et dans lequel il s’est déclaré ouvert à des discussions avec l’Arabie saoudite si le blocus qu’elle impose au Yémen est levé.
« J’appelle nos frères dans les pays voisins (…) à arrêter leur agression et à lever le blocus (…) et nous tournerons la page », a-t-il.
« Nous promettons à nos frères et voisins que dès qu’un cessez-le-feu sera en place et que le blocus sera levé, nous dialoguerons directement via l’autorité légitime représentée par notre parlement », a-t-il ajouté.
S’adressant aux troupes de l’armée yéménite, alliées à Ansarullah, il leur a demandé de ne plus combattre à leur côté.
« J’invite tout le peuple yéménite dans toutes les provinces à se révolter pour défendre le Yémen contre les éléments houthis qui sèment le chaos au Yémen depuis trois ans pour se venger de ceux qui réalisé son unité », a-t-il dit aussi.
« Tes propos ont été bien accueillis par les forces de l’offensive », lui a reproché M. Houthi. Selon lequel les récentes déclarations de M. Saleh montrent bien qu’il coopère avec les forces de l‘offensive, en allusion à la coalition arabe menée contre le Yémen par l’Arabie saoudite depuis 2015.
Affrontements meurtriers à Sanaa
Les deux discours interviennent aussi sur fond de crispation et d’affrontement entre les Houthis et les militants du Parti du Congrès populaire dans les rues de la capitale Sanaa et il y a eu des tués de part et d’autres.
« Sanaa jouissait de sécurité et de stabilité avant que les milices n’en viennent à semer le chaos. Il y a des milices qui sèment le chaos dans la capitale Sanaa avec le soutien de forces politiques dont les velléités sont désormais dévoilées au grand jour », a accusé M. Houthi.
« C’est une trahison nationale et un poignard dans le dos des gens du Yémen… Vous pointez vos fusils contre les habitants de Sanaa et les institutions étatiques… vous appelez les autres provinces à s’entretuer, … vous œuvrez pour que la sédition sévit dans tout le pays et c’est une honte », a-t-il adressé aussi à M. Saleh.
« Les propos du chef des milices (En allusion à M. Saleh, ndlr) constituent un appel à la sédition, au chaos, aux combats fratricides, à la haine,… Alors que nous avons appelé au retour à la stabilité et aux efforts pour instaurer un règlement basé sur l’entente et la coopération entre tous », a-t-il dit aussi.
M. Houthi a poursuivi : « Nous avons demandé à ces milices et à leur chef de recourir à l’arbitrage des hommes sages dans le Congrès populaire et des hommes sages du Yémen, pourquoi ont-ils refusé », s’est-il interrogé en allusion aux appels à la réconciliation lancés par les responsables d’Ansarullah. Il a toutefois appelé les hommes libre au sein du Congrès ne pas écouter ces appels, leur disant : « notre problème n’est pas avec le Congrès mais avec les milices et celui qui les sponsorise ».
L’histoire de Tarek Saleh
Selon Press TV, citant le correspondant de l’agence iranienne Fars News, les milices dont il est question sont dirigées par Tarek Mohammad Saleh, le neveu de M. Saleh et connu sous le nom de Tarek Afash.
Il a créé un groupe armé à Sanaa, défié les ordres des forces de sécurité, déstabilisé la capitale par des actions suspectes et heurté la sensibilité d’Ansarallah.
Il a libéré un dangereux criminel nommé J. N. qui lors de son arrestation, possédait des documents compromettants : la liste des lieux de rassemblements de Saleh et de sa famille, ainsi que de ceux des responsables du Congrès. Il y avait aussi une liste des cibles militaires et des numéros des agents secrets saoudiens qui aurait été communiquée en échange de renseignements sur les cibles potentielles au Yémen, précise l’agence Fars News.
Voyant le danger que court le pays, Ansarallah a appelé Tarek Afash à répondre à ses attentes. Mais ce dernier a fait fi de cet appel et préparé le terrain à une confrontation de son groupe armée avec les forces de sécurité à Sanaa, qui s’est soldée par plusieurs morts.
Campagne médiatique saoudienne
Cette escalade intervient aussi alors que les médias saoudiens et émiratis font état d’une rébellion menée par les combattants pro Saleh dans la capitale Sanaa et allèguent qu’ils ont conquis avec l’aide de certaines tribus de nombreux sites gouvernementaux, « dont les batiments du ministère de la Défense et des Douanes et des finances », selon le site de la chaine de télévision saoudienne Al-Arabiyyat.
Le correspondant d’al-Manar au Yémen a assuré que ces informations étaient exagérées , et accusé les médias saoudiens de mener une campagne de désinformation.