Ces dernières années, notamment après la crise mondiale de 2008-2009, plus personne ne pense à l’or. Par ailleurs, de moins de moins de nouveaux gisements sont découverts, ce qui pourrait provoquer un déficit de fournitures et une hausse des prix à terme.
Selon Vestifinance.ru Pierre Lassonde, cofondateur et président de l’entreprise Franco-Nevada, a déclaré dans une interview à la revue financière allemande Finanz une Wirtschaft qu’actuellement on assistait à une diminution palpable du nombre de grands gisements d’or. Les mines d’or légendaires comme Witwatersrand en Afrique du Sud, Carlin Trend au Nevada et Super Pit en Australie connaîtront bientôt la fin de leur cycle de vie et pourraient rapidement disparaître.
A long et moyen terme, cela pourrait entraîner un déséquilibre de l’offre et de la demande, et au final exercer une pression conséquente sur le prix de l’or.
A la fin du XXe siècle, au moins un gisement de 50 millions d’onces était découvert chaque décennie, ainsi qu’au moins 10 mines de 30 millions d’onces et encore plus de mines de 5-10 millions d’onces. Mais l’analyse de la situation ces 15 dernières années met en évidence l’impossibilité de découvrir de nouveaux gisements de 50 millions et de 30 millions d’onces, ainsi qu’extrêmement peu de gisements de 15 millions d’onces.
En effet, les compagnies ont dû réduire le budget qu’elles allouaient aux explorations géologiques suite à la diminution des prix de l’or. Plus tôt cette année, la compagnie S&P Global Market Intelligence a rapporté que le budget total des compagnies chargées de l’exploitation des métaux non ferreux pour l’exploration s’était réduit pour la quatrième année consécutive en 2016.
Les budgets ont chuté à 6,9 milliards de dollars, au plus bas depuis 11 ans. Malgré une hausse des dépenses cette année, elles restent significativement inférieures par rapport au pic de 2012.
Étant donné que l’exploitation d’un nouveau gisement nécessite sept ans en moyenne avant le début de la production, l’extraction pourrait diminuer encore plus rapidement dans les années à venir.
«En réalité, peu importe quel sera le prix de l’or ces prochaines années. La production se poursuit, ce qui signifie que l’augmentation des prix de l’or pourrait être très intensive», a déclaré Pierre Lassonde.
D’autres facteurs contribuent à la baisse, notamment les règles plus strictes et les frais de production plus élevés. Contrairement à l’industrie pétrolière, la méthode de fracturation hydraulique n’a pas encore été inventée pour permettre d’extraire de l’or dans les régions difficiles d’accès, même si Barrick, le plus grand producteur mondial, a effectué des expériences dans son projet Cortez au Nevada.
L’an dernier, les experts ont déclaré qu’un facteur supplémentaire susceptible de réduire l’exploitation de nouveaux gisements était le fait que la production était réalisée à des niveaux peu profonds. Les chercheurs doivent à présent creuser plus en profondeur et travailler dans des conditions plus extrêmes pour découvrir des gisements économiquement rentables.
Il suffit de voir la chute de la production annuelle en Afrique du Sud, autrefois le plus grand producteur d’or du monde. Dans les années 1880, à Witwatersland en Afrique du Sud, a été découvert un gisement abritant plus de 40% de la quantité totale d’or extrait de toute l’histoire de l’humanité. Cela a transformé Johannesburg en l’une des plus grandes villes du monde. Aujourd’hui, l’économie de l’Afrique du Sud est la plus stable de l’Afrique subsaharienne grâce à l’or.
Plus de 1.000 tonnes métriques ont été extraites en 1970 — une quantité incroyable. Et depuis, la production chute. Au pic de la production en Afrique du Sud en 2016 seulement 167,1 tonnes ont été extraites — une chute de 83% par rapport au pic de 1970. Les mineurs d’or de la fameuse mine de Mponeng, déjà la plus profonde du monde — elle s’enfonce à 2,5 milles — continuent de creuser dans le sol.
La même diminution menace l’Australie ces 40 prochaines années. La première étude réalisée par MinEx Consulting et parue ce mois-ci indique que dans ce pays la production d’or entamera une baisse significative à partir d’aujourd’hui et jusqu’en 2057. D’ici là, 67 des 71 gisements actuels seront épuisés. La plupart d’entre eux fermeront d’ici une vingtaine d’années.
Toute production supplémentaire dépendra du succès des explorations, qui seront de plus en plus difficiles si les compagnies n’investissent pas et si le gouvernement australien n’assouplit pas les règles d’extraction.
Selon MinEx, «pour que l’industrie minière d’or australienne puisse maintenir la production au niveau actuel à long terme, il sera nécessaire soit de doubler la somme dépensée pour l’exploration, soit de doubler l’efficacité des travaux d’exploration».
Les grands gisements n’ont toutefois pas complètement disparu. En mars, il a été rapporté que Shandong Gold Group, le deuxième plus grand producteur chinois, avait découvert un gisement dans l’est de la Chine abritant entre 380 et 550 tonnes d’or. Il s’agirait du plus grand gisement du pays dont la durée d’exploitation serait de 40 ans à partir du début des opérations.
De plus, ce mois-ci, Kitco a rapporté que la Seabridge Gold implantée à Toronto avait découvert un important gisement d’or en Colombie-Britannique. Cette découverte a été faite après le recul d’un glacier. Selon les estimations, il contient la quantité impressionnante de 780 tonnes métriques.
«Il ne fait aucun doute qu’au fur et à mesure de la fonte des glaciers les capacités d’exploration seront élargies. Il sera possible de faire davantage de découvertes dans cette région», a déclaré à Kitco le directeur général de Seabridge Rudi Fronk. La compagnie a déjà reçu l’autorisation pour lancer l’extraction.
Les dépenses pour l’exploration montent en flèche. D’après S&P Global Market Intelligence, elles ont augmenté sur 12 mois, selon les informations de septembre, pour la première fois depuis 2012. Les budgets ont grimpé de 14% en glissement annuel jusqu’à 7,95 milliards de dollars. Au cours de cette période, les compagnies de production d’or ont dépensé environ 4 milliards de dollars pour l’exploration, soit près de la moitié de tous les budgets pour l’extraction de métaux non ferreux.
Comme la recherche devient de plus en plus coûteuse, les grands producteurs pourraient décider d’acquérir des sociétés plus petites avec des projets vérifiés et rentables.
Cela pourrait représenter une grande valeur pour les investisseurs et il faut donc surveiller les «juniors» ciblés par des absorptions. Par exemple, dans l’industrie minière australienne, on constate une certaine augmentation des transactions par rapport à l’an dernier selon le rapport de septembre de BDO. L’an dernier, Goldcorp a signé un contrat pour acheter le junior Kaminak Gold à Vancouver, et en mai de la même année el Dorado a annoncé l’acquisition d’Integra Gold pour 590 millions de dollars.
Pierre Lassonde pense que l’or doit représenter 5 à 10% du portefeuille des investisseurs.
Source: Sputnik