La rencontre qui a eu lieu la semaine passée entre le président américain Donald Trump et le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov fait toujours l’objet de spéculations malsaines dans les médias américains.
Il y a eu d’abord l’affaire des photos qui ont été prises pour les deux hommes lors de leur rencontre et ont été publiées par le site du ministère russe des AE, puis par les médias russes.
Le président américain y a été accusé d’avoir accordé un traitement de faveur au journaliste russe qui accompagnait la délégation russe officielle.
Cette fois-ci, il est accusé d’avoir divulgué pour son hôte russe une information ultra sensible selon laquelle la milice wahhabite terroriste Daesh (Etat islamique) préparait un attentat.
Selon l’AFP, citant comme source le Washington Post, ces informations avaient été communiquées par un partenaire des Etats-Unis qui n’avait pas donné l’autorisation à Washington de les partager avec Moscou.
Selon un responsable américain cité par le Washington Post, les informations communiquées par M. Trump à M. Lavrov ainsi qu’à l’ambassadeur de Russie aux Etats-Unis Sergueï Kisliak, également présent, avaient l’un des degrés de classification les plus élevés utilisés par les agences de renseignement américaines.
Le président américain « a révélé plus d’informations à l’ambassadeur russe que nous n’en avons partagé avec nos propres alliés », a indiqué ce responsable, sous couvert d’anonymat.
« Du n’importe quoi »
Or, pour le Kremlin, cette nouvelle affaire c’est du « n’importe quoi ».
« Pour nous, ce n’est pas la question, c’est encore une fois n’importe quoi. Et nous ne voulons rien avoir à faire avec ce n’importe quoi. C’est du grand n’importe quoi », a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, à des journalistes, ajoutant n’avoir « ni à démentir ni à confirmer » ces informations.
La porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères Maria Zakharova a elle aussi commenté sur sa page Facebook le scandale autour de la rencontre entre le Président américain Donald Trump et le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov.
« Je vous rappelle que le 11 mai, j’avais lancé une mise en garde: quelques jours plus tard, les médias américains avaient apparemment l’intention de lancer une information « sensationnelle » sur la rencontre entre Lavrov et Trump. Cependant, l’idée consistait aussi à l’illustrer avec des photos toutes aussi « secrètes » de la réunion, ce qui devait donner à ce nouveau fake de la solidité et de la crédibilité », a-t-elle écrit. « Mais nous (les autorités russes) avons ruiné cette partie du plan de cette campagne informationnelle en publiant des photos conformément à toutes les lois de l’éthique professionnelle », a-t-elle conclu.
« C’est mon droit »
Sachant que des démentis ont été émis par les plus hauts responsables de l’administration américaine ayant participé à la rencontre entre Donald Trump et Sergueï Lavrov, la Maison-Blanche, elle, a pris ces accusations au sérieux.
Donald Trump a affirmé mardi sur Twitter qu’il en avait « absolument le droit » de partager des informations avec qui il veut.
Pour le blog américain spécialisé Lawfare, référence aux Etats-Unis notamment sur les questions légales relatives au terrorisme, « il s’agit peut-être de la plus grave accusation de mauvaise conduite présidentielle en quatre mois d’une administration Trump plombée par les scandales ».
Ses auteurs soulignent que le président est autorisé à révéler les informations qu’il désire et n’a donc pu « enfreindre aucune loi pénale concernant la divulgation d’informations classifiées dans ce cas-là ».
Mais les données communiquées « semblent être d’une nature extrêmement sensible » et les révélations du Washington Post semblent indiquer « que des informations classifiées révélées pourraient être utilisées pour déduire des sources et méthodes qui n’ont pas directement été révélées ».
Tout en avançant que le partage du renseignement entre Washington et ses alliés « est essentiel pour la sécurité des Etats-Unis dans le monde, et en particulier dans la lutte de la coalition contre l’EI », ils ont toutefois souligné que l’affaire pourrait « être potentiellement lourde de conséquences ».
Depuis son investiture, le comportement du président américain est sous haute surveillance par les milieux politiques et médiatiques proches des Démocrates qui appréhendent qu’il ne mette à exécution sa promesse électorale d’un rapprochement avec Moscou.
Appels à la destitution
D’ores et déjà, quelques appels ont été lancés en faveur de sa destitution, l’accusant d’entrave à la justice et d’avoir donné des renseignements à la Russie.
Il s’agit des deux sénateurs démocrates Al Green et Maxine Waters, qui estiment que le limogeage la semaine dernière de James Comey, directeur du FBI, s’assimile à une tentative d’entraver l’enquête du FBI sur une éventuelle coordination entre l’équipe de campagne de Donald Trump et la Russie.
S’est aussi mêlé à la valse le présentateur et humoriste Stephen Colbert (CBS) et l’éditorialiste conservateur David Frum (The Atlantic).
Et pour le constitutionnaliste Laurence Tribe (Harvard), il existait suffisamment d’éléments, depuis le début du mandat, pour lancer une procédure de destitution.
« Le pays est confronté à un président dont le comportement suggère fortement qu’il pose un danger pour notre système de gouvernement », a-t-il écrit le week-end dernier dans une tribune au Washington Post.
Pas de dossier
Or la chef démocrate du Congrès américain, Nancy Pelosi, opte pour une position diamétalement opposée, estimant insuffisants les faits contre lui.
« Je ne soutiens pas cela », a déclaré Mme Pelosi undi soir lors d’une émission sur CNN. « Si on commence à parler de destitution, il faut qu’on sache quels sont les faits. Cela ne peut pas être seulement, je ne l’aime pas ou je n’aime pas ses cheveux (…) Quelles règles aurait-il violées? » « Sans dossier, on ne ferait que participer aux rumeurs », a-t-elle ajouté.
Une destitution, prévue par la Constitution pour des cas de « trahison, corruption ou tous autres crimes et délits majeurs », se déroule en plusieurs temps. D’abord, la Chambre doit voter une mise en accusation (« impeachment »); dans ce cas, c’est au Sénat de faire le procès du président, afin de le condamner et destituer, à une majorité de deux tiers, ou de l’acquitter.
Aucun élu important du Congrès, à ce stade, ne soutient une telle procédure contre Donald Trump, affirme l’AFP.
Sources: Sputnik, AFP