Mohamed Chia al-Soudani, chargé jeudi de former un nouveau gouvernement en Irak, est un politicien issu du sérail chiite traditionnel, qui devra composer avec des adversaires de taille.
Plusieurs fois ministre et deux fois député, M. Soudani, 52 ans, succède à Moustafa al-Kazimi, ancien journaliste devenu chef des renseignements et propulsé à la direction de l’Irak dans un contexte de crise.
Né le 4 mars 1970, orphelin à neuf ans d’un père exécuté pour sa résistance à l’ancien régime, M. Soudani est représentatif de cette classe politique chiite, autrefois fer de lance de l’opposition à Saddam Hussein, et qui arriva au pouvoir après l’invasion américaine de 2003.
Diplômé en agronomie, il gravit les échelons de l’appareil étatique dès 2004, jusqu’à devenir gouverneur de la province de Missane, frontalière de l’Iran et riche en pétrole.
En 2010 il lance sa carrière à Bagdad, et sera ministre des droits humains, puis des Affaires sociales ou encore de l’Industrie. Il fera notamment partie d’un gouvernement dirigé par Nouri al-Maliki.
C’est d’ailleurs avec le soutien de M. Maliki et ses alliés, les influentes factions du Hachd al-Chaabi qui combattent Daech avec l’aide de l’Iran, et encadrées politiquement dans le Cadre de coordination, que M. Soudani doit aujourd’hui composer son gouvernement.
Moustache en brosse et cheveux drus noirs coupés court, vêtu de classiques costumes aux couleurs sombres, M. Soudani fait campagne depuis fin juillet: il rencontre les députés de l’opposition et présente un programme ambitieux pour lutter contre la corruption et reconstruire les infrastructures ravagées par les conflits.
Ce n’est pas la première fois qu’il est candidat au poste de Premier ministre. Pressenti en 2019, son nom sera immédiatement rejeté par un vaste et inédit mouvement de contestation, qui dénonce l’intégralité de la classe politique.
« Il n’a pas de passé douteux, ni d’énormes accusations de corruption le visant », concède Sajad Jiyad, chercheur au think-tank Century International.
Mais pour les anti pouvoir, « il n’a pas la réputation d’un réformateur, il fait partie de l’establishment politique, et ça ne laisse pas penser qu’il pourrait être différent », ajoute-t-il.
Quand en juillet dernier, le Cadre de coopération le désigne comme son candidat.
Pour les sadristes, poursuit M. Jiyad, « il semble faire partie du camp de Maliki », rival de M. Sadr.
Après avoir fait ses premières armes au sein du parti de M. Maliki, M. Soudani a fondé en 2021 sa propre formation, Al-Furatain, représentée au Parlement par trois députés.
« C’est un homme d’Etat », indique à l’AFP le secrétaire-général adjoint du parti, Bachar al-Saïdi.
Comme pour amadouer Moqtada Sadr qui exige des législatives anticipées, M. Soudani a déjà averti qu’un scrutin devrait avoir lieu « d’ici un an et demi ». Et il a qualifié le mouvement sadriste de « grand courant populaire et patriote ».
Pour le politologue Hamzeh Hadad, le Premier ministre désigné « a de bonnes relations avec les partis à travers tout le spectre » politique. Comme M. Kazimi, « il représente la prochaine génération de politiciens irakiens ».
M. Soudani est marié et père de cinq enfants.
Source: Avec AFP