L’Américain Francis Fukuyama, qui a acquis une célébrité mondiale suite à la publication de son article The end of History? (La fin de l’histoire?) sur la suprématie des États-Unis sur le reste des pays et de la démocratie libérale sur les autres modèles étatiques, a changé d’avis et considère que le temps des succès de l’Occident est révolu.
« Nous ne pouvons pas exclure la possibilité que nous traversions des bouleversements politiques comparables à la chute du communisme », écrit le philosophe et politologue américain Francis Fukuyama dans son article intitulé America: the failed state (Amérique, l’État défaillant), paru dans le mensuel britannique Prospect.
Selon lui, l’ascension fulgurante de Donald Trump et l’essor du nationalisme en Europe sont loin d’être un hasard. C’est plutôt un signe de grands changements et ces derniers peuvent mettre un terme à tous les efforts entrepris par Washington depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
« Sous Barack Obama, la Chine est prête à arracher aux États-Unis sa place de leader en termes de valeur de son économie. La crise bancaire de 2008 a mis en doute l’autorité des élites qui ont créé ce système assez risqué. À en croire Bernie Sanders et Donald Trump, Hillary Clinton incarne la corruption. Le système politique américain est devenu en fait dysfonctionnel. Toutefois, les critiques n’ont pas correctement défini la source du problème », estime-t-il.
Francis Fukuyama considère que les problèmes des États-Unis ne sont pas tant extérieurs qu’intérieurs. Au lieu d’accomplir leur mission, les citoyens ont commencé à faire tout simplement de l’argent et bâtir leur carrière en se basant sur des intérêts purement matériels.
Dans un autre article publié en 2014 dans la revue Foreign Affairs America in Decay (l’Amérique en déclin), Fukuyama pointe que les spécialistes de l’administration publique ont noté une nette dégradation de la qualité du gouvernement américain depuis plusieurs générations.
« À bien des égards, la bureaucratie américaine s’est éloignée de l’idéal wébérien (en référence à l’économiste allemand Max Weber) d’une organisation de travail dynamique et efficace, lorsque les gens sont sélectionnés en fonction de leurs compétences et de leur niveau de connaissances », estime-t-il.
Dans ce même article, le philosophe met en relief la crise de la représentation du pouvoir aux États-Unis, en lequel les citoyens ordinaires n’ont pas seulement perdu confiance, mais qui estiment aussi que le gouvernement soi-disant démocratiquement élu ne prend plus en compte leurs intérêts et est sous le contrôle de différentes élites de l’ombre. Une administration publique inefficace, la lutte des élites, l’aspiration de la société à l’enrichissement et la crise du pouvoir font « reculer » l’Amérique, conclut le Francis Fukuyama.
Source: Sputnik