Donald Trump a reculé sur un possible allègement des restrictions visant à ralentir la propagation du coronavirus, reconnaissant que les Etats-Unis n’avaient pas encore connu le pic de la pandémie qui continue chaque jour de faire des morts par centaines en Europe, surtout en Italie, en Espagne et en France.
« Les projections indiquent que le pic du taux de mortalité devrait probablement avoir lieu dans deux semaines », a admis le président américain, depuis les jardins de la Maison Blanche.
Quelques heures plus tôt, l’un des plus éminents spécialistes américains Anthony Fauci, également conseiller du président sur ce dossier, avait mis l’Amérique face à la gravité de l’épidémie. Il avait évoqué la possibilité qu’elle fasse « entre 100.000 et 200.000 » morts, contre près de 2.500 actuellement.
Les Etats-Unis sont déjà le pays enregistrant le plus grand nombre de cas confirmés, environ 140.000.
Faute de vaccin ou de traitement éprouvé contre la maladie de Covid-19, qui a fait plus de 33.000 morts sur la planète, plus de trois milliards de personnes sont toujours confinées, de gré ou de force.
En Europe, où se concentrent deux tiers des décès enregistrés dans le monde, les autorités sanitaires espèrent en revanche approcher du pic de l’épidémie.
Ralentissement en Italie
Entre samedi et dimanche 29 mars, l’Espagne a tout de même enregistré 838 morts, un nouveau record, pour le troisième jour consécutif, de décès en 24 heures, pour atteindre un bilan de 6.528.
« Notre problème fondamental en ce moment est de garantir que les unités de soins intensifs ne saturent pas », a résumé le directeur du Centre d’urgences sanitaires, Fernando Simon.
« Mon unité est totalement pleine, à cent pour cent. On ne peut plus admettre un malade de plus », a déclaré à l’AFP Eduardo Ferandez, infirmier dans une unité de soins intensifs à Madrid, lui-même en arrêt maladie après avoir été testé positif au SARS-Cov-2.
En Italie, pays qui enregistre le record mondial de décès — 10.779 pour 97.689 cas recensés –, le confinement commence à produire des résultats encourageants après trois semaines.
« Dans tous les services d’urgences, on enregistre une réduction » des arrivées de patients, selon Giulio Gallera, responsable de la santé de la région septentrionale de Lombardie, la plus touchée.
Six mois
Aux Etats-Unis, la mise à l’arrêt de pans entiers de l’activité provoque déjà un chômage de masse. Et Donald Trump avait affirmé en début de semaine dernière que les Etats-Unis pourraient redémarrer leur économie avant Pâques, soit le 12 avril.
Il espérait annoncer dans quelques jours un assouplissement des recommandations gouvernementales de distanciations sociales. Mais il a dû faire machine arrière, et les Américains sont encouragés à rester chez eux encore pendant un mois. Ecoles et lieux de rassemblements resteront fermés.
« Nous prolongerons nos recommandations jusqu’au 30 avril pour ralentir la propagation », a affirmé le président américain.
L’épidémie s’accélère aussi au Royaume-Uni, avec désormais 1.228 morts pour quelque 20.000 cas confirmés.
« Nous savons que les choses vont s’aggraver avant qu’elles ne s’améliorent », a prévenu le Premier ministre Boris Johnson, lui-même contaminé, exhortant la population à respecter le confinement général instauré lundi soir pour trois semaines.
Les autorités sanitaires ont mis en garde contre une levée prématurée du confinement, estimant que la population risquait de ne pas retrouver une vie « normale » avant six mois.
Malades évacués
Confrontée à un afflux de malades dans les hôpitaux et à une pénurie de matériel qui s’annonce, la France (plus de 2.600 morts, dont 292 ces dernières 24 heures) a commandé un milliard de masques et compte presque tripler le nombre de lits affectés à la réanimation.
Un avion militaire allemand et un hélicoptère de l’armée française ont évacué vers l’Allemagne plusieurs patients de l’est de la France, où les services de réanimation sont saturés.
Un ministre des Finances se suicide
En Allemagne, où le ministre des Finances d’un exécutif régional, « profondément inquiet » des répercussions de la pandémie sur l’économie, s’est suicidé, les groupes Adidas et H&M ont suscité l’indignation en annonçant vouloir cesser de payer les loyers de leurs magasins fermés.
Les Pays-Bas voisins, qui refusent pour l’heure de confiner leurs 17 millions d’habitants, annonceront mardi s’ils continuent dans cette voie, après avoir franchi dimanche la barre des 10.000 contaminations recensées, pour 771 décès.
« Mourir de faim »
En Russie, dont les frontières seront bouclées à partir de lundi, le maire de Moscou a annoncé dimanche un confinement général de la population de la capitale.
Les autorités iraniennes ont aussi demandé à la population de rester confinée, et ont prévenu que les restrictions de déplacement devraient être prolongées, alors que 123 décès supplémentaires ont été enregistrés en 24 heures dans le pays, l’un des plus touchés au monde, avec plus de 2.600 morts.
La Chine, où s’est déclarée la pandémie en décembre, a fermé depuis samedi ses frontières à la plupart des étrangers et réduit drastiquement ses vols internationaux pour prévenir un retour du coronavirus via des cas « importés ».
Dans les pays les plus pauvres, notamment en Afrique, les restrictions de déplacement et d’activité s’avèrent compliquées à mettre en oeuvre.
Au Zimbabwe, usé par deux décennies de crise économique et financière, le confinement de trois semaines à partir de lundi décrété par le président Emmerson Mnangagwa s’annonce particulièrement pénible pour ses 16 millions d’habitants.
« Peu de gens peuvent se payer un repas quotidien en temps normal », a souligné un résident de la capitale, Prince Gwanza. « J’ai peur que des gens meurent de faim lorsqu’ils seront isolés chez eux ».
Un constat qui amène certains dirigeants du continent à renoncer à ce type de restrictions, considérées comme au-dessus des moyens de leur pays, à l’image du président béninois Patrice Talon: « Si nous prenons des mesures qui affament tout le monde, elles finiront très vite par être bravées et bafouées ».
Le président nigérian Muhammadu Buhari a néanmoins ordonné dimanche soir un confinement total des populations d’Abuja, la capitale fédérale, et de Lagos, mégalopole tentaculaire de 20 millions d’habitants, alors que les cas officiels d’infection au Covid-19 frôlent la centaine.
Pas de confinement en Angola, mais le pays a annoncé dimanche soir ses deux premiers décès.
Source: AFP