Les pressions faites par les lobbies pro israéliens dans la capitale belge n’ont pas pu interdire un carnaval belge qui fait défiler entre autre des caricatures de personnages juifs.
Cette fête vieille de 600 ans s’est déroulée comme prévu le dimanche 23 février dans la ville d’Alost, avec dans l’un de ses cortèges un char caricaturant des juifs orthodoxes avec des nez crochus.
Des fourmis
Mais le défilé de cette année s’est abstenu d’illustrer les sacs d’or, qui avaient soulevé l’ire de certains milieux l’an dernier, et dont les bruits étaient parvenus jusqu’à l’Unesco qui l’a rayé du patrimoine immatériel de l’Unesco.
Il s’est contenté de deux papillotes tombant d’un grand chapeau de fourrure noir, accessoire caractéristique des juifs orthodoxes, sont visibles un peu partout.Certains ont choisi d’ajouter à ce déguisement un masque en faux cuir ressemblant à une muselière pour symboliser la « censure » imposée par le « politiquement correct ».
Dans l’une des représentations, les juifs orthodoxes sont caricaturés sous formes de fourmis
Beaucoup de calicots font référence à l’Unesco, moquée en « Big brother » qui surveille et punit.
« On rit de tout »
«Ce n’est pas une parade antisémite, Alost n’est pas une ville antisémite», a insisté le maire d’Alost, Christoph D’Haese, cité par l’AFP.
Expliquant qu’il est permis de «rire de tout» pendant ce rituel festif de trois jours, il a précisé : «ici on rit de tout, de la famille royale, du Brexit, de la politique locale et nationale, et de toutes les religions, l’islam, le judaïsme, le catholicisme».
Des pressions énormes
A l’approche de de l’édition 2020, les pressions en provenance des milieux juifs et israéliens étaient énormes en vue de son élimination.
Des représentants de la communauté juive et l’ambassadeur d’Israël en Belgique, Emmanuel Nahshon, ont exprimé des craintes quant à la réapparition de «clichés antisémites» cette année à Alost.
Le chef de la diplomatie israélienne, Israel Katz, a même appelé jeudi 20 février sur Twitter les autorités belges à «bannir cette parade haineuse», dont la Belgique devrait avoir «honte».
Et l’Union européenne
Après sa tenue, ce sont des politiciens européens qui se sont mis à la tâche pour le dénoncer.
Le député juif européen français Raphaël Glucksmann a déploré sur sa page Twitter que les juifs y soient illustrés comme « de la vermine pleine de fric qui contrôle le monde quand même ».
«Pour moi c’est clair: le carnaval d’Alost est une honte. Il doit cesser. Pas de place pour ça en Europe», a twitté le commissaire grec Margaritis Schinas, également vice-président de la Commission.
Un porte-parole de l’exécutif européen, Adalbert Jahnz, avait pour sa part jugé que ces caricatures n’avaient «rien à faire dans les rues européennes 75 ans après la Shoah».
Pour la Première ministre belge, Sophie Wilmès, «l’utilisation de stéréotypes, de référents stigmatisant des communautés, des groupes humains sur base de leurs origines conduit aux divisions et met en péril le vivre ensemble», a regretté cette libérale francophone, ajoutant que ces faits «portent préjudice à nos valeurs ainsi qu’à la réputation de notre pays». Selon elle, «il revient aux institutions compétentes et à la justice de déterminer si les faits qui se sont déroulés pendant le carnaval enfreignent la loi».
Le président du Comité de coordination des organisations juives de Belgique (CCOJB) s’est dit horrifié par le défilé. Il espère une réaction du monde politique. « Je suis vraiment choqué par ces images de juifs caricaturés en insectes ou à côté de sacs de diamants », a réagi Yohan Benizri.
« Les juifs manquent d’humour »
Sur place à Alost, les avis sont contraires à ceux des politiciens et personne pourtant n’estime avoir manqué de respect aux juifs, d’après les témoignages recueillis dimanche par l’AFP.
Le char controversé de 2019 relèverait d’une simple incompréhension.
« Ils n’ont jamais eu l’intention de se moquer des juifs et de blesser, l’attention des médias est complètement exagérée », lâche un infirmier de l’hôpital d’Alost, qui préfère taire son nom.
Avec les gros sacs
d’espèces, le groupe qui avait affrété ce char voulait faire une allusion à sa propre recherche de fonds pour prendre une année sabbatique, assure ce trentenaire en habit de ville. L’image était peut-être juste « maladroite », concède-t-il.
« Allez à Anvers, chez les diamantaires, vous verrez ils sont comme ça », lance à ses côtés un homme déguisé en femme dans un grand sourire, tandis qu’un autre, Guy Verhuslt, médecin à Alost, regrette que « les juifs manquent d’humour ».
Justement dans la ville belge d’Anvers, le quartier des diamantaires est habité par deux communautés majeures, dont celle des diamantaires juifs.
Source: Divers