Trois jours après le crash de l’avion d’Ukrainian Airlines: l’Iran a reconnu ce samedi 11 janvier avoir abattu le Boeing 737 par « erreur » et a présenté ses excuses. Ses responsables militaires ont expliqué les conditions qui ont abouti à l’erreur humaine.
Le vol PS752 de la compagnie Ukraine Airlines International (UAI) s’est écrasé de nuit à l’ouest de Téhéran, très vite après son décollage. Les victimes sont essentiellement des Irano-Canadiens, mais aussi des Afghans, des Britanniques, des Suédois et des Ukrainiens.
Guide: Un lourd fardeau
Le guide suprême d’Iran, l’ayatollah Ali Khamenei, a ordonné aux forces armées du pays de remédier à toute « négligence » et exhorté à faire le nécessaire « pour éviter la répétition d’accident pareil », selon un communiqué publié samedi sur son site internet.
« Après avoir consulté les résultats de l’enquête qui a conclu à une erreur humaine, j’ai senti un lourd fardeau sur mon dos en raison de la catastrophe due à la perte des passagers dans cet accident triste », a-t-il dit dans le texte. Présentant ses condoléances aux familles des sinistrés et sa pleine solidarité avec elles.
Rohani: Une erreur impardonnable
L’Iran regrette « profondément » ce crash, « une grande tragédie et une erreur impardonnable », a déclaré le président iranien Hassan Rohani.
« L’enquête interne des forces armées a conclu que de manière regrettable des missiles lancés par erreur ont provoqué le crash de l’avion ukrainien », a-t-il rapporté sur Twitter.
Zarif: Aventurisme américain
Plus tôt, le ministre des Affaires étrangères iranien Mohammad Javad Zarif avait déjà exprimé des « excuses », tout en déplorant une « erreur humaine en des temps de crise causée par l’aventurisme américain (qui) a mené au désastre ».
« Placées au plus haut niveau d’alerte pour répondre aux éventuelles menaces » américaines, les forces armées iraniennes avaient expliqué plus tôt que l’appareil avait été pris pour un « avion hostile ». « Le responsable » de cette erreur va être traduit « immédiatement » en justice, a ensuite précisé l’état-major.
Etat d’alerte maximale
Ce grave incident s’est produit à un moment où les forces armées iraniennes étaient en état d’alerte maximale. Elles avaient 5 heures plus tôt, procédé à une spectaculaire frappe balistique contre la plus grande base américaine en Irak, Aïn al-Assad. En riposte à l’assassinat de son chef de la force al-Quds du Corps des gardiens de la révolution islamique en Iran, le général Qassem Soleimani, dans un raid américain à proximité de l’aéroport de Bagdad en Irak.
Des avions américains
Le site en ligne francophone de la télévision iranienne Press TV a rapporté les conditions qui ont abouti à cette erreur humaine, citant des sources militaires iraniennes.
Dans les heures qui ont suivi la frappe, les forces américaines ont multiplié des vols militaires, près des frontières aériennes de l’Iran. Selon des informations communiquées aux unités de défense antiaériennes, rapporte Press TV, peu avant l’incident du Boeing 737, certains centres militaires stratégiques du pays avaient été approchés par des avions de combat ennemis, ce qui a redoublé la sensibilité des unités de la DCA.
Toujours selon le site francophone de la télévision iranienne, le communiqué de l’état-major met en relief une « énorme anomalie » qui a « leurré » le système de défense antiaérienne de la capitale et fait croire à « l’approche d’un avion ennemi vers un centre militaire sensible » et partant, a causé, la « tragique erreur humaine».
« Dans cette conjoncture délicate et critique, le vol 752 de la ligne aérienne ukrainienne a décollé de l’aéroport Imam Khomeiny. Au moment où l’avion faisait demi-tour, il est passé pour un appareil militaire qui se dirigeait tout droit vers un centre militaire ultra-sensible des gardiens de la révolution, d’autant plus qu’il se trouvait en altitude et en position d’un appareil ennemi », explique le communiqué.
Et d’ajouter : « Malheureusement, une erreur humaine a eu lieu et l’avion a été pris pour cible d’une manière non intentionnelle». »Le responsable » va être traduit « immédiatement » en justice, a-t-il conclu
Chef du CGRI: l’avion pris pour un missile de croisière
Le système de défense antiaérienne iranien a pris l’avion ukrainien pour un missile de croisière et le soldat qui a effectué le tir a pris la mauvaise décision, a déclaré le commandant des forces aérospatiales des Gardiens de la Révolution iraniens, Amir Ali Hajizadeh.
«Dans de telles situations, il faut d’habitude contacter le pilote, mais le système télécom a connu un brouillage» et le soldat a fait feu sans avoir pu obtenir la confirmation d’un ordre de tir, a-t-il expliqué dans une déclaration à la télévision iranienne.
«Le système de DCA a pris l’avion ukrainien pour un missile de croisière se trouvant à une distance de 19 kilomètres», a indiqué Amir Ali Hajizadeh.
Le militaire n’a eu que «10 secondes pour décider», a-t-il ajouté.
Endossant le drame, le général Hajizadeh, a conclu: « J’aurais préféré mourir que d’assister à un tel accident ».
Selon l’AFP, l’Iran avait invité Boeing, le constructeur américain de l’avion, à participer à l’enquête, ainsi que les Américains, les Canadiens, les Français et les Suédois à observer les méthodes de travail suivies par les Iraniens dans cette affaire.
Russie: Tirer les leçons
Un haut responsable russe a appelé Téhéran à tirer les leçons de son erreur.
« Si le déchiffrage des boîtes noires et les travaux de l’enquête ne prouvent pas que l’armée iranienne a fait cela intentionnellement et qu’il n’y a pas de raisons logiques à cela, l’incident doit être clos. Avec l’espoir que les leçons seront tirées et des mesures prises par toutes les parties », a déclaré le président de la commission des Affaires étrangères du Parlement, Konstantin Kossatchev.
France : mettre un terme à l’escalade
«Les leçons que nous devons tirer de cette séquence dramatique que nous avons vécue depuis maintenant plusieurs jours, depuis la fin de l’année 2019, c’est qu’il faut mettre un terme à cette escalade», a poursuivi la ministre française.
Canada: Nombre des victimes revu à la baisse
Concerné directement par l’accident, vu que la majorité des victimes ont la nationalité canadienne, le Premier ministre canadien Justin Trudeau avait estimé le jeudi qu’il ne s’agissait pas d’un accident. « Nous avons des informations de sources multiples » qui « indiquent que l’avion a été abattu par un missile sol-air iranien », disait-il. « Ce n’était peut-être pas intentionnel ».
En outre, le nombre des victimes canadiennes du crash a été revu à la baisse, passant de 63 à 57 morts sur un total de 176 passagers, a annoncé vendredi le ministre canadien des Affaires étrangères.
Ukraine: des compensations
Pour sa part, le ministre ukrainien des Affaires étrangères Vadym Prystaïko avait souligné que les enquêteurs ukrainiens bénéficiaient de la « coopération entière » de Téhéran. »Nous attendons de l’Iran (…) que les coupables soient traduits en justice », « le paiement de compensations » et « le retour des corps des victimes », a exigé Le président ukrainien Volodymyr Zelensky sur Facebook.