Les éléments de preuve rassemblés au cours de l’enquête sur l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi donnent à penser que cet assassinat constitue « une exécution extrajudiciaire » et peut-être un acte de torture pour lequel la responsabilité de l’Arabie saoudite est engagée, a souligné la Rapporteure spéciale des Nations Unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires.
Présentant son rapport aux membres du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies ce mercredi à Genève, l’experte, Agnès Callamard, a indiqué qu’il existait « de nombreuses théories sur les circonstances de la mort de M. Khashoggi, mais aucune de ces théories ne conduit à une autre conclusion que celle de la responsabilité de l’État saoudien ».
Agnès Callamard est ainsi revenue sur le rôle des « 15 agents de l’État saoudien » agissant sous le sceau officiel de leur État qui ont participé à « l’exécution » de l’éditorialiste du Washington Post. « Son assassinat, résultat d’une planification minutieuse impliquant une coordination étendue et des ressources humaines et financières considérables, a été surveillé, planifié et approuvé par de hauts responsables », a-t-elle fait valoir.
Une façon pour l’experte indépendante onusienne d’insister sur la « préméditation » de ce crime et surtout pour souligner que cet assassinat ne pouvait pas être considéré uniquement comme une affaire nationale.
« Le meurtre a eu lieu de façon extraterritoriale et s’est déroulé dans un consulat en Turquie, motivé par le désir de faire taire un journaliste qui s’était exilé de lui-même aux États-Unis », a argumenté Mme Callamard. Selon elle, l’assassinat de M. Khashoggi constitue donc une violation de la Convention de Vienne sur les relations consulaires, mais aussi l’interdiction de l’emploi de la force hors des frontières en temps de paix.
En conséquence, le meurtre de M. Khashoggi constitue donc « un crime international ». La Rapporteure spéciale a appelé la Turquie et les États-Unis à prendre les mesures nécessaires pour exercer leur compétence universelle en droit international s’agissant de ce crime. D’autant que la responsabilité des États soulève la question de savoir qui est finalement responsable du meurtre, a-t-elle poursuivi.
Reste que l’enquête a apporté des preuves crédibles, justifiant un complément d’enquête, de la responsabilité individuelle de hauts responsables saoudiens, notamment celle présumée du prince héritier d’Arabie saoudite. L’enquête menée par les autorités saoudiennes n’a pas permis de s’attaquer à la chaîne de commandement. Toutefois, « il ne s’agit pas juste d’une question de qui a ordonné le meurtre ». « La responsabilité pénale peut découler d’une incitation directe ou indirecte ou de l’incapacité à prévenir ou à protéger, a fait remarquer Mme Callamard.
Source: UN.ORG