À peine quelques jours après que la République islamique d’Iran a menacé de fermer le détroit d’Hormuz, les monarchies arabes ont déjà lancé une série de tentatives destinées à minimiser l’importance géopolitique de ce détroit névralgique.
Le site d’information al-Waqt a fait paraître, ce mardi 10 juillet, un article avec pour titre « Les plans des Arabes pour contourner le détroit d’Hormuz ».
En 2006, année où les États-Unis ne cessaient de menacer l’Iran d’une intervention militaire, celui-ci a menacé de fermer le détroit d’Hormuz, qui compte parmi les voies navales internationales les plus importantes pour le transfert d’hydrocarbures. Cet événement a poussé certains pays de la région à concocter plusieurs projets censés les immuniser face à une telle menace. Par exemple, les Émirats arabes unis ont inauguré un pipeline reliant le port de Fujaïrah à la mer d’Oman en vue d’aider ce pays à surmonter la crise, au cas où l’Iran fermerait le détroit stratégique d’Hormuz.
Le port de Fujaïrah et l’oléoduc Habshan
Les Émirats arabes unis ont inauguré, le 30 juin 2012, l’oléoduc Habshan-Fujaïrah, pour un coût de 3,3 milliards de dollars. Cet oléoduc est long de 380 kilomètres et il se situe entièrement sur le sol émirati.
L’oléoduc Habshan-Fujaïrah part du champ pétrolier onshore de Habshan à Abou Dhabi et arrive au port de Fujaïrah sur la mer d’Oman après avoir traversé des centaines de kilomètres en passant par la ville de Sweïhan.
Le port de Fujaïrah a une superficie de 1 165 km² et abrite presque 130 000 personnes.
Fujaïrah est l’unique port des Émirats arabes unis sur la mer d’Oman, ce qui lui confère un caractère tout particulier aux yeux des dirigeants émiratis pour minimiser l’importance géopolitique du détroit d’Hormuz et le contourner au cas où l’Iran mettait ses menaces à exécution.
L’oléoduc Habshan-Fujaïrah a la capacité de transférer entre 1,5 et 1,8 million de barils de brut par jour, ce qui représente trois quarts des exportations quotidiennes des Émirats arabes unis.
Le détroit d’Hormuz : état actuel ?
Le détroit d’Hormuz est un passage maritime international, long de 158 kilomètres, qui relie le golfe Persique aux eaux internationales.
Le détroit d’Hormuz est plus profond que le golfe Persique et il dispose d’une profondeur qui varie du nord au sud. Le détroit d’Hormuz est le deuxième détroit international le plus fréquenté du monde, et est considéré par le département américain de l’Énergie comme le « plus vital passage pétrolier ».
C’est par le détroit d’Hormuz que passent 18 millions de barils de brut par jour, ce qui équivaut plus de 20 % du transit du brut mondial.
Les monarchies riveraines du golfe Persique ainsi que l’Iran détiennent 90 % de l’excédent du pétrole du monde et ils l’exporteront sur les marchés mondiaux en cas de déclenchement d’une crise et de pénurie de brut. Cela s’ajoute à 77 millions tonnes de gaz liquéfié qui sont transférées via le détroit d’Hormuz sur les marchés mondiaux. Ce chiffre équivaut à 30 % des exportations de gaz liquéfié dans le monde.
En ce qui concerne les exportations non pétrolières, 2,9 milliards de tonnes de marchandises transitent par le détroit d’Hormuz. Il s’agit d’un seul trajet reliant le port de Dubaï (cœur économique des Émirats arabes unis) aux eaux internationales et aux marchés internationaux. La vie économique des ports commerciaux des pays arabes du golfe Persique dépend donc directement du détroit d’Hormuz.
Le détroit d’Hormuz et le commerce non pétrolier
De nombreux navires géants, avec la capacité de porter 2,9 milliards de tonnes de marchandises, traversent chaque année le détroit d’Hormuz, qui permet également le transit de 22 % de navires, chargés de produits secs comme du blé, des céréales, du fer et du béton. C’est la raison pour laquelle les émirats arabes riverains du golfe Persique ont plusieurs projets pour inaugurer de nouveaux ports ou développer leurs ports existants afin qu’ils puissent augmenter leurs parts dans ce commerce croissant de produits non pétroliers.
Dans la foulée, le Qatar construit un grand port, avec un budget de 1,7 milliard de dollars, près de la zone industrielle et du port de Mesaieed.
L’Arabie saoudite a, pour sa part, déjà lancé un projet d’investissement de 600 millions de dollars pour augmenter la capacité annuelle du port de Dammam.
En mettant en parallèle le détroit d’Hormuz et le port de Fujaïrah, il est à noter que l’oléoduc Habshan-Fujaïrah n’est capable que de transférer 90 % de la production pétrolière des Émirats arabes unis et cela à condition que la pleine capacité de ce pipeline soit exploitée.
Cela signifie que les Émirats arabes unis ont encore besoin du détroit d’Hormuz pour exporter les 10 % restants de son pétrole.
Autrement dit, l’oléoduc Habshan-Fujaïrah n’appartient qu’aux Émirats arabes unis et il ne représente pas un projet international, ni même régional. Toute comparaison avec le détroit d’Hormuz reste donc exagérée. En bref, il est impossible aux autres pays arabes du golfe Persique de contourner le détroit d’Hormuz.
Par ailleurs, le service que rend le port de Fujaïrah aux cargos en les approvisionnant en carburant pourra uniquement continuer à condition que les navires puissent traverser le détroit d’Hormuz.
Les exagérations des dirigeants émiratis concernant l’oléoduc Habshan-Fujaïrah et leurs tentatives de le faire apparaître aussi important et stratégique que le détroit d’Hormuz ne puisent nullement leur origine dans la réalité, mais plutôt dans une campagne de propagande dont l’objectif est de minimiser l’importance du détroit d’Hormuz, en tant qu’arme géopolitique entre les mains de la République islamique d’Iran.
Source: PressTV