Détention illégale, tortures: depuis son ouverture, Guantanamo fait l’objet de virulentes condamnations internationales et illustre le deux poids deux mesures des USA en matière de droits de l’Homme. Le jour où Donald Trump refuse de le fermer, Sputnik revient sur les pratiques les plus horribles dont ce lieu controversé a été le théâtre.
Le camp de Guantanamo restera ouvert. D’un seul trait de plume, Donald Trump a anéanti mardi tous les efforts déployés au fil des 16 dernières années par les défenseurs des droits de l’Homme et les personnalités politiques qui n’ont eu de cesse de dénoncer un véritable «camp de concentration» de notre époque.
Le camp, situé sur la base navale américaine de la baie de Guantanamo, à la pointe orientale de Cuba, a été ouvert sous la présidence de George W. Bush pour regrouper les «ennemis combattants» capturés dans le cadre de la «guerre contre le terrorisme» déclarée après les attentats du 11 septembre 2001.
Depuis sa création, la prison a accueilli 779 détenus soupçonnés d’activités terroristes, arrêtés en Afghanistan, au Pakistan et ailleurs. La majorité d’entre eux n’ont été ni inculpés ni jugés, s’alarme Amnesty International. Fait important: les prisonniers ne jouissent pas des droits habituellement accordés par le système légal des États-Unis, car ils ne sont pas détenus sur le sol américain.
Barack Obama avait signé, le jour de son investiture en 2009, un décret ordonnant la fermeture du camp dans un délai d’un an. Mais la mise en œuvre de ce projet avait été bloquée par l’opposition républicaine au Congrès. Au fil des transferts de prisonniers menés sous les deux mandats d’Obama, la population carcérale de Guantanamo s’est toutefois nettement réduite, passant de 242 à 41 détenus, détaille Reuters.
Or, après le récent décret de Trump rien ne garantit plus que leur nombre n’augmentera pas à nouveau. Afin de comprendre les raisons pour lesquelles cette perspective a de quoi alimenter des débats, Sputnik revient sur certaines des histoires macabres qui hantent les couloirs de Guantanamo.
«Techniques d’interrogatoire additionnelles»
Entre les murs de Guantanamo, les tortures revêtent le doux euphémisme de «techniques d’interrogatoire additionnelles» et ont à l’époque été approuvées par le secrétaire à la Défense américain, Donald Rumsfeld. Mohamedou Ould Slahi a passé 14 ans sans procès dans le camp. Les autorités américaines l’accusaient d’être un membre d’al-Qaïda puis l’ont remis en liberté en 2016 sans n’avoir rien prouvé. Dans «Carnets de Guantanamo», publié en 2014, l’homme raconte qu’il a été soumis à plusieurs de ces techniques: entraves qui l’empêchaient de bouger, torture à l’eau salée qu’il a été forcé de boire.
«Ils me mettaient des objets dans la bouche et criaient: « Avale, enfoiré!’ Je ne voulais pas avaler cette eau dangereuse pour mon organisme, qui m’étouffait au fur et à mesure qu’ils remplissaient ma bouche. ‘Avale, idiot.’ J’ai réfléchi rapidement et j’ai choisi de boire l’eau salée, plutôt que mourir [d’étouffement]», racontait-il en 2015, cité par l’AFP.
Profanation du Coran
La direction de la prison a été par ailleurs violemment critiquée pour avoir manipulé le Coran de manière à offenser les détenus: un rapport de l’armée américaine, diffusé en 2005, a révélé que des exemplaires du livre sacré des musulmans avaient été arrosés d’eau et d’urine ou encore piétinés.
Simulation de noyade
Comme l’a révélé au printemps dernier un rapport du Sénat américain sur le recours à la torture par la CIA, plusieurs suspects avaient été suspendus au plafond par des chaînes, les bras menottés dans le dos, et avaient subi des «réhydratations rectales» forcées ou des séances de «waterboarding» (simulation de noyade) dans des prisons secrètes.
D’autres détenus avaient été attachés pendant des jours dans le noir, projetés contre les murs, plongés dans des bains glacés, privés de sommeil pendant une semaine, frappés ou harcelés psychologiquement.
Tortures sensorielles
Selon des documents confidentiels divulgués en 2004 par le Washington Post, le Pentagone a donné son feu vert à bien d’autres types de tortures, dont l’exposition à des températures extrêmes, à l’utilisation de lumières vives ou de musique forte durant les interrogations des prisonniers.
«Gavage»
Des prisonniers qui refusaient de se nourrir ont été gavés de force. Si les grévistes de faim renonçaient aux repas qui leur étaient servis, les gardiens les attachaient à une chaise et leur inséraient une fine sonde en caoutchouc dans le nez jusqu’à l’estomac. «C’est juste inconfortable», estimait un aide-soignant, Eric, cité en été 2013 par L’Obs. Des propos qui viennent pourtant à l’encontre de ceux tenus par les grévistes de la faim soumis contre leur gré à cette procédure. «C’était une douleur atroce dans ma poitrine, ma gorge et mon estomac», a au contraire affirmé un d’entre eux dans une tribune au New York Times.
Source: Sputnik