L’arrêt des transactions pétrolières avec le Kurdistan irakien, demandé par Bagdad comme mesure de rétorsion à la tenue lundi du référendum de séparation dans cette province autonome, dépend essentiellement de la Turquie.
Ankara est en effet le premier concerné puisque 550.000 des 600.000 barils/jour produits par le Kurdistan irakien sont exportés via Ceyhan, dans le sud de la Turquie.
La Turquie peut donc fermer l’oléoduc qui relie l’Irak à Ceyhan, où les dépôts de brut construits dans les années 1980 ont appartenu à Bagdad avant que le gouvernement autonome kurde ne mette la main dessus en 2014.
Selon un récent rapport de la Banque mondiale, ces revenus pétroliers représentent l’essentiel des ressources du Kurdistan irakien, qui n’a pas su diversifier ses ressources.
Sur son flanc Est, l’Iran a fermé lundi sa frontière terrestre par laquelle était acheminé le fioul kurde vers les marchés du Golfe. Avec la fermeture de Ceyhan, le Kurdistan irakien se retrouverait donc asphyxier économiquement.
Mais, même si Ankara est vent debout contre le référendum et souhaite montrer ses muscles, il n’est pas certain qu’il veuille pour autant cesser de profiter de ce juteux commerce.
« La question n’est pas de pouvoir mais vouloir. Jusqu’à quel point la Turquie est-elle prête à aller pour empêcher qu’il y ait un Etat kurde à ses frontières? », s’interroge Ruba Husari, experte du pétrole irakien.
« Si la Turquie est sérieuse dans ses menaces, elle peut bien sûr empêcher l’exportation du pétrole du Kurdistan », confirme-t-elle, ajoutant que la question est bien de savoir si Ankara est prêt à « tirer un trait » sur ses propres bénéfices.
Parmi ces avantages figurent, selon les experts, les droits par baril transporté mais aussi et –surtout– l’accord signé autrefois entre l’Irak et la Turquie selon lequel la compagnie publique turque Botas s’approvisionne en pétrole irakien via cet oléoduc.
Autre bénéfice: les revenus de la vente du pétrole du Kurdistan sont déposés dans une banque turque avant d’être transférés aux Kurdes, selon un accord entre Erbil et Ankara.
Il y a d’autres intérêts croisés, poursuivent les experts, en relevant le fait que la Turquie a accordé des prêts au gouvernement kurde, ou encore qu’une compagnie turque a été créée pour se joindre aux sociétés prélevant le brut à Ceyhan.
Source: Avec AFP