C’était un samedi 30 août 2014. Le ministre des Affaires étrangères du Bahreïn, Khaled ben Ahmad Al Khalifa, passe en revue les messages diffusés sur Twitter, quand il fut attiré par le Tweet d’une militante qatarie rapportant les propos de l’académicien qatari Mohammed al-Misfer dans lesquels il affirme: » La crise du Golfe a pour cause l’Egypte , notamment la position de soutien du Qatar envers le pouvoir légitime égyptien ».
Dans une conversation directe, le ministre bahreïni a transmis ce message à son homologue égyptien Abdallah ben Zayed. Le site de la télévision Al-Manar a reçu les fuites de la conversation privée entre les deux hommes.
« Envoyez une copie à la salle des opérations », a affirmé M.BenZayed.
M. Khaled ben Ahmad Al Khalifa lui répond : »Cette salle d’opération semble être une salle d’anesthésie « .
Quelle est cette salle d’opération?
Il s’agit d’une salle qui abrite vingt chaînes de télévision, mais aussi des journalistes, des écrivains et des analystes qui travaillent pour le compte de l’Arabie.
Le ministre des Émirats arabes unis bénéficie d’un représentant tout comme le ministre du Bahreïn. C’est du moins, ce qui a été confirmé par les deux ministres à travers leur conversation. La mission de cette salle est de fabriquer et de diriger des campagnes de diffamation, de définir leurs politiques de propagation de nouvelles mensongères et de superviser leurs missions.
Le ministre bahreïni a passé la nuit à suivre les opérations de cette « chambre noire » … Il a envoyé un nouveau message au ministre émirati : « La salle a commencé à fonctionner et nous suivons toutes les nouvelles de l’actualité … Puisse Allah nous soutenir ».
Le lendemain, le quotidien saoudien Al-Chark Al-Awsat, la chaine satellitaire saoudienne Al-Arabiya, ainsi que la chaine satellitaire émiratie Sky News et celle bahrénite Al-Ayyam ont rapporté que « l’ambiance positive qui a régné dans la réunion des ministres des Affaires étrangères du CCG, ne signifie pas la fin de la crise entre l’Arabie saoudite, les EAU et le Bahreïn, d’une part et le Qatar, d’autre part. Car, Doha a toujours soutenu les Frères musulmans et n’a pas signé le pacte de Riyad, et si Qatar ne signe pas ce pacte et refuse de l’exécuter, il affrontera des mesures extrêmement répressives ».
Dans cette salle d’opérations, les ministres des Affaires étrangères du Bahreïn, des Émirats arabes unis et de l’Arabie louent les services des quotidiens arabes et étrangers. Leur mission : diffuser les rapports fabriqués par les écrivains de cette « chambre noire » afin de porter atteinte à l’image de leurs adversaires. A savoir: l’Iran, la Syrie et récemment, le Qatar.
Le mardi 29 août 2017, Al-Charq Al-Awsat a lancé une nouvelle campagne de diffamation contre la victoire de la bataille contre Daech, et ce, en déviant l’attention du public vers une autre direction. Ainsi, sur sa page d’accueil, le journal saoudien écrit: « De Qalamoun aux frontières de l’Irak.. Sous les auspices du régime ». Dans l’actualité, aucune mention n’est faite sur la question de l’évacuation des hommes armés de Daech -qui se sont rendus dans le Qalamoun syrien et dans les jouroud libanais de Ras-Baalbek et du Qaa .
Dans le même numéro, le quotidien saoudien a publié un article de son ancien rédacteur en chef et ancien directeur général d’Al-Arabiya, Abdelrahman Al-Rashed, intitulé « l’impact de la défaite de l’armée libanaise ».
M.Al-Rashed a tenté de discréditer l’impact positif de la coordination de l’armée libanaise avec le Hezbollah dans les batailles des jouroud de Ersal et du Qalamoun.
« L’affaire parait douteuse », a-t-il écrit. « Autoriser l’évacuation d’autant de combattants de Daech en échange de cadavres alors que le Hezbollah prétend avoir pris le contrôle de ces régions montagneuses, est louche. D’ailleurs, les familles des soldats libanais morts ont considéré cet échange comme une trahison à leurs fils martyrs ».
Le quotidien londonien Al-Arab, financé par les Émirats arabes unis, a repris les idées de l’article de M.Al-Rashed sous le titre « l’horizon des jourouds … le Hezbollah craint la force croissante de l’armée libanaise ».
Or, cette campagne de diffamation ne s’est pas limitée aux frontières libano-syrienne, elle a frappé les frontières irako-syriennes.
Ainsi, la chaine satellitaire émiratie, SkyNews a diffusé un rapport sur son site internet intitulé: » après le Liban. Le scandale du Hezbollah et de Daech qui a ébranlé l’Irak ».
Pis encore,
Le quotidien bahreïni Al-Watan a écrit un article, intitulé « comment philosopher la défaite » : les événements se sont conclus dans l’intérêt du Liban, de sorte que le pays n’a pas récupéré ses soldats vivants, ni n’a pu juger leurs meurtriers, pire encore, ils ont été évacués en toute sécurité vers leur siège ». .
Mercredi dernier, Al-Charq Al-Awsat publie un article intitulé « L’accord conclu entre Hezbollah et Daech: une affaire rêvée ». L’article conclut que « la bataille des armées, libanaise et syrienne, contre Daech s’est terminée par des résultats décevants », soulignant que » les hommes de Daech ont été évacués dans d’immenses bus climatisés depuis la frontière syro-libanaise jusqu’à l’extrême est de la Syrie, à la frontière irakienne, sous la protection des forces du régime syrien ».
Parallèlement, Al-Arabiya publie sur son site internet tous les articles qui discréditent la victoire libanaise. Sur sa page d’accueil, la chaine écrit: « L’accord conclu entre le Hezbollah et Daech provoque l’Irak … » c’ est une agression contre nous ».
A son tour, toute la presse des pays du Golfe ont repris toutes les idées qui remettent en question la victoire du Liban sur les takfiristes , en remplaçant les termes « désertion » ou « défection » ou « reddition » par « accord » ou « affaire » , rappelant à tout bout portant « l’évacuation de Daech dans des bus climatisé ».
Bref, toute cette campagne nous ramène à la case départ: les fuites des Tweets du ministre bahreïni. Sauf que cette fois, les fuites impliquent un journaliste libanais qui s’est plaint de la négligence saoudienne envers le Liban, l’implorant à soutenir ce pays « dans une bataille politique qui pourrait reformuler un projet de confrontation avec le Hezbollah ».
C’est du moins ce dont a fait allusion le ministre bahreïni dans ses conversations tweets: »cette question revêt une grande importance pour nous, car ceux qui nous combattons en Syrie et au Yémen, ont leur siège au Liban »..
Source: AlManar