Donald Trump s’est déchaîné jeudi contre Harvard, devenue la principale cible d’une offensive plus large contre le système d’éducation américain.
Le président américain a accusé la prestigieuse université, l’une des mieux classées au monde, d’être une « institution antisémite d’extrême gauche » et une « menace pour la démocratie », dans un long message sur son réseau Truth Social.
L’accusation d’antisémitisme est fréquemment employée par l’administration Trump pour justifier ses mesures contre les établissements d’enseignement supérieur ainsi que certains étudiants étrangers, les plus visés étant ceux qui ont participé aux manifestations dénonçant la guerre menée par Israël à Gaza après les attaques du 7 octobre 2023.
« Un détournement du combat contre l’antisémitisme » qui vise à « couper le financement d’universités et à les punir gratuitement », ont taclé, dans une lettre ouverte adressée jeudi à Donald Trump, cinq sénateurs démocrates de confession juive, dont le chef de file de l’opposition au Sénat, Chuck Schumer.
« Foutoir progressiste »
Pour le président américain, qui a signé mercredi une série de décrets visant à augmenter encore un peu plus la pression sur les universités américaines, Harvard est « un foutoir progressiste » et « accepte des étudiants du monde entier qui veulent détruire notre pays ».
Dans son message, l’ancien promoteur immobilier appelle également à « virer » un avocat qui travaille pour sa société, la Trump Organization, et qui représente par ailleurs également Harvard.
Peu après, son fils Eric Trump a indiqué à CNN s’être séparé de William Burck, avocat très apprécié dans les milieux républicains, qui avait été recruté comme conseiller de la Trump Organization et qui a aussi été chargé par Harvard de défendre l’université face à la Maison Blanche.
L’université s’est distinguée en attaquant en justice l’administration Trump contre un gel de plus de deux milliards de dollars de subventions fédérales, décidé après que la célèbre institution a refusé de se plier à une série d’exigences de la Maison Blanche.
Le président américain, qui reproche aux universités d’être des foyers de contestation progressiste, veut avoir un droit de regard sur les procédures d’admission des étudiants, les embauches d’enseignants et les programmes.
« Autocratique »
Harvard a pris la tête d’un mouvement d’opposition rejoint par d’autres grands noms tels que Yale ou Princeton, qui ont rejeté ensemble « l’ingérence politique », dans un communiqué mardi.
« Les enseignants sur le campus sont bien conscients que nous sommes face à un gouvernement de plus en plus autocratique et autoritaire qui tente de démanteler non seulement nos universités, mais le secteur de l’enseignement supérieur dans son ensemble », a déclaré jeudi à l’AFP Kirsten Weld, professeure d’histoire et présidente d’une association de professeurs (AAUP) à Harvard.
Harvard, à l’image d’autres campus américains, a été critiqué pour sa gestion du mouvement contre la guerre à Gaza, accusé à la fois de manquer de fermeté face à des débordements antisémites, mais aussi d’enfreindre la liberté d’expression des étudiants propalestiniens.
Mais depuis l’offensive de Donald Trump, « il y a plus d’unité qu’il n’y en a jamais eu depuis un an et demi », explique Kirsten Weld.
« Terrifiés »
La semaine dernière, le ministère de la Sécurité intérieure a aussi menacé de retirer à Harvard la possibilité d’accueillir des étudiants étrangers, à moins que l’université n’accepte de lui fournir des informations sur les dossiers disciplinaires et leur participation à des manifestations.
« Les étudiants étrangers sont terrifiés. Ils sont en quelque sorte otages des menaces de l’administration Trump (…) cela met certains d’entre d’eux dans des niveaux de stress et d’anxiété inimaginables », a ajouté la professeure.
Le président américain, qui veut démanteler le ministère de l’Education, a signé mercredi une nouvelle volée de décrets censés empêcher les idées progressistes de se répandre dans les écoles.
L’un des textes promet ainsi de renforcer les attributions des enseignants et des écoles en matière de « discipline ».
Un autre vise les organismes qui évaluent les performances des universités et leur éligibilité à des financements fédéraux (« accreditors »), accusés par le camp Trump d’être « basés sur une idéologie +woke+ » et non sur le mérite.
Par « woke », la Maison Blanche et plus largement la droite américaine désignent les idées visant à promouvoir la diversité.
Source: AFP