Les Néerlandais, pour beaucoup encore indécis après une campagne marquée par des questions d’identité et une crise diplomatique avec la Turquie, sont appelés aux urnes mercredi pour des législatives considérées comme un baromètre du populisme avant des votes similaires en Europe.
Après le Brexit au Royaume-Uni et la victoire de Donald Trump à la présidentielle américaine, tous les yeux sont braqués sur la formation du député islamophobe Geert Wilders, qui est redescendu dans les derniers sondages après avoir caracolé en tête pendant de nombreux mois.
Les 12,9 millions d’électeurs potentiels pourront se rendre aux urnes dès 07H30 (06H30 GMT) sur le chemin du travail ou de l’école, les bureaux de postes étant installés dans les gares, les magasins, ou parfois même chez des particuliers.
Les bureaux fermeront à 21H00 (20H00 GMT), et les premières estimations sont attendues peu après, alors qu’un nombre record d’électeurs ignorent vers quel candidat se portera leur crayon rouge une fois dans l’isoloir.
Dans une ultime tentative de séduire les électeurs, les têtes de listes se sont écharpées mardi soir à la télévision. « Si les gens ont besoin d’un dirigeant, c’est vers moi que leur regard se tourne », a affirmé le Premier ministre Mark Rutte.
Ce candidat du statu quo a tenté de transformer l’élection en duel avec Geert Wilders et assuré aux Néerlandais qu’ils avaient le choix entre deux options: le chaos ou la stabilité.
Baisse de Wilders
Les derniers sondages publiés mardi montrent que le Parti populaire libéral et démocrate (VVD) de Mark Rutte distance le Parti pour la liberté (PVV) de Geert Wilders.
Le VVD est crédité de 24 à 28 sièges sur les 150 que compte la chambre basse du parlement néerlandais, loin pourtant de ses 40 sièges au parlement sortant.
Le PVV, qui a fait la course en tête pendant des mois, n’est crédité que de 19 à 22 sièges et est talonné par les partis traditionnels, comme l’Appel Chrétien-démocrate (CDA) et les progressistes de D66.
Le CDA, qui a longtemps dominé la politique néerlandaise, pourrait également devenir la plus grande formation du pays, et est presque assuré de se retrouver au gouvernement. Pendant la campagne, il a proposé d’obliger les écoliers à chanter l’hymne national et a rouvert le débat sur la double nationalité.
Tout comme le VVD, ces deux partis ont promis de ne pas collaborer avec Geert Wilders. Dans son programme politique qui tient en un feuillet, celui-ci a promis de fermer les frontières aux immigrants musulmans, d’interdire la vente du Coran et de fermer les mosquées, dans un pays dont la population compte environ 5% de musulmans.
Alors que ses vues lui ont apporté un soutien au coeur de la crise migratoire, beaucoup de Néerlandais les estiment trop fortes.
« Il a le droit de donner son opinion mais il ne propose aucune solution, il ne fait que créer de la peur », estime ainsi Niels en regardant le débat depuis un bar de La Haye.
Paysage fragmenté
Même si le PVV sortait des urnes comme la plus grande formation du pays, ce qui est peu probable aux yeux des experts, Geert Wilders ne devrait pas figurer au gouvernement, la majorité des autres partis refusant de coopérer. Or le système électoral néerlandais, à la proportionnelle presqu’intégrale, oblige à créer des coalitions de gouvernement.
Compliquant le paysage politique, une crise politique a éclaté pendant le week-end entre La Haye et Ankara, après l’interdiction faite par les autorités néerlandaises à des ministres turcs de participer à des meetings en faveur du président turc Recep Tayyip Erdogan.
Un nombre record de 28 partis ont présenté des listes. Dans un paysage aussi fragmenté, la formation de la nouvelle coalition pourrait prendre des mois – le record actuel est de 208 jours – et résulter en un accord à quatre ou cinq partis.
Le Pen soutient son « ami » néerlandais Geert Wilders
Réagissant à ces élections, la dirigeante de l’extrême droite française, Marine Le Pen, a de nouveau apporté mardi son soutien à son allié néerlandais Geert Wilders, qu’elle a qualifiée d' »ami » et de « patriote », à la veille de législatives aux Pays-Bas.
« Geert Wilders n’est pas d’extrême droite, il est un patriote », a affirmé Mme Le Pen sur RFI et France 24, alors que M. Wilders et son Parti pour la Liberté (PVV) est crédité de 20 à 24 sièges sur les 150 que compte la chambre basse du Parlement.
« A chaque fois que, dans un pays, un homme s’oppose à l’immigration massive, il est traité de populiste, de raciste, de xénophobe, etc (…) est-ce qu’on a le droit d’être opposé à l’immigration sans se faire insulter? », a poursuivi la présidente du Front national (FN), en tête des sondages pour le premier tour de l’élection présidentielle en France, le 23 avril.
Le FN de Mme Le Pen forme avec les eurodéputés du PVV de M. Wilders un groupe commun au Parlement européen. A 53 ans, l’élu néerlandais se considère en croisade contre « l’islamisation » de son pays, veut fermer les mosquées, et compare le Coran, qu’il veut interdire, à « Mein Kampf » d’Adolf Hitler.
Il s’en est aussi pris récemment à « la racaille marocaine » et a été reconnu coupable le 9 décembre de discrimination pour avoir promis, après les élections municipales de mars 2014, « moins de Marocains » aux Pays-Bas.
Mme Le Pen, interrogée sur « l’élan » que pourrait lui procurer une victoire éventuelle de son allié mercredi, a dit n’avoir « pas besoin de la victoire de (s)on ami Geert Wilders. »
« Il y a au sein des peuples européens un rejet massif de l’UE et de ce qu’elle représente, la mondialisation sauvage, les délocalisations, la désindustrialisation de nos pays, l’immigration massive, la mise en danger des peuples », a-t-elle jugé.
Source: Avec AFP