Lors de l’ouverture de la Conférence pour la paix au Proche-Orient ce dimanche à Paris, le ministre des affaires étrangères Jean-Marc Ayrault a déclaré que la « La solution de deux États – israélien et palestinien – est la seule possible ». On se demande comment M. Ayrault voit la réalisation d’un tel projet avec ses petits bras musclés, même avec l’aide des 70 pays et organisations internationales présents à Paris.
A l’heure actuelle, avec les différentes colonies implantées en Cisjordanie, il n’est simplement pas possible d’imaginer un État, même embryonnaire, avec des frontières autonomes. Pour qu’un état puisse être créé, il faudrait décoloniser, c’est-à-dire renvoyer tous les colons, des sionistes idéologiques purs et durs, dans leurs pays d’origine ou, à défaut, leur créer une situation d’intégration dans la société israélienne, et Israël ne dispose et n’a prévu aucun moyens dans ce sens.
Israël, en tant qu’entité de colonisation, n’a prévu que l’expansion et, accessoirement la consolidation de ses acquis. C’est sa raison d’être, c’est le gage de sa prospérité, de sa puissance et de l’appui dont il bénéficie. C’est ce qu’il appelle, dans son habituelle rhétorique, « son existence ». Comment dès lors lui faire renoncer à cette « existence » et lui faire faire marche arrière, autrement qu’en lui déclarant la guerre?
Jean-Marc Ayrault a plus de chances et de capacités de déclarer la guerre au peuple de France, à la Corse, la Bretagne, au Pays Basque ou à la Savoie qu’à Israël. Cela tout le monde le sait, y compris les dirigeants israéliens. Les dirigeants allemands, britanniques ou américains sont logés à la même enseigne que notre gouvernement. Il n’y a besoin d’aucun développement là-dessus, c’est juste un fait, connu de tous.
Puisqu’il ne sera, en aucune façon, possible d’annuler les colonies, ni même d’arrêter la poursuite de la colonisation, aucun État palestinien entièrement autonome ne sera possible. Il est illusoire de penser que les sionistes purs et durs installés sur les colonies en Cisjordanie puissent se transformer en de paisibles palestiniens et y rester sous législation palestinienne. Le premier venu a pleinement conscience de cette réalité, à plus forte raison le ministre des affaires étrangères Jean-Marc Ayrault, qui fut également le premier ministre de la France. Alors, à quoi riment ses déclarations fumeuses à propos de deux États que l’on sait impossibles, sinon à permettre de maintenir et prolonger indéfiniment le statu quo ?
En annonçant, de manière ferme, presque en tapant du poing sur la table, la volonté de la France pour la création d’un État palestinien, Jean-Marc Ayrault donne l’impression d’accéder à la demande palestinienne, et semble prendre fait et cause pour les revendications légitimes d’un peuple spolié, se positionnant en défenseur des droits du plus faible. Sauf que tout cela n’est qu’une posture, accentuée par celle d’Israël, qui affecte d’être outré et en colère contre une pseudo-attaque contre lui. Une double posture dans la grande comédie internationale qui se joue en ce moment. Encore une fois, ce sera Paris qui en sera le décor, et la France historique, à travers les pions placés au gouvernement, en sera la caution morale.
L’intérêt d’Israël a toujours été, depuis toujours, de maintenir le statu quo lui permettant de réaliser son expansion et la sécurisation des zones acquises. Son meilleur allié pour cela, c’est le temps. Le temps de construire une route, de fortifier une colonie, d’élever un mur, de bâtir une maison dans un endroit dont on a chassé les occupants palestiniens. Le fait accompli est la règle, et pour cela le paramètre temps, celui qui fera oublier ou relativiser l’injustice initiale, ou qui permettra d’ancrer dans les têtes le récit qu’aura construit Israël, avec l’aide bienveillante des médias, est hyper important. Pour gagner du temps lors de négociations durant le pseudo- « processus de paix », Netanyahou et ses prédécesseurs ont toujours demandé l’impossible, l’essentiel étant de ne jamais arriver à des solutions. C’est exactement ce qu’est en train de faire Jean-Marc Ayrault. Netanyahou n’aurait pas fait mieux.
Mais Netanyahou et ses chefs préfèrent sans doute que cela se fasse à Paris, en France, ce pays historiquement des Droits de l’Homme qui se pencherait sur la misère d’un peuple opprimé. Les mêmes termes DroitDeLhommistes dits par un haut ministre de la France ont une autre portée que s’ils avaient été prononcés par un Netanyahou dont on connait le côté partisan. Un statu quo validé en France, à Paris ou, si possible à Versailles, revêt un poids certain et permet de voir venir. La conférence de Paris sur le Proche-Orient semble donc n’être qu’une conférence de validation du statu quo dont a besoin Israël pour poursuivre « son existence » par le biais de sa colonisation qui ne s’arrêtera que le jour où toutes les terres convoitées (pas seulement la Cisjordanie) seront occupées.
Jean-Marc Ayrault et le gouvernement français, ont-ils conscience de tout cela ? Quand on parle de « solution », c’est que cette solution est du domaine du possible, sinon cela relève du vœu pieux, et il n’y aurait plus qu’à prier que Dieu ou la providence vienne arranger les choses. Or un gouvernement n’est ni une église, ni un mouvement mystique. Il doit s’appuyer sur du concret, pour des solutions concrètes, bonnes ou mauvaises. Si, dans le cadre de cette conférence, Ayrault et le gouvernement français n’ont pas conscience qu’ils travaillent pour le sionisme israélien, leur comportement ressemble alors à celui d’une secte de mystiques religieux avec ses mantras, ses rites et ses manifestations spectaculaires, destinés à s’attirer gloire, sympathie et adeptes. Même dans ce cas, ils ne seraient que l’instrument d’un programme sophistiqué car, derrière toute secte, il y a des manipulateurs.
Source : Avic – Réseau International