Depuis que le président américain Donald Trump a fait son annonce-surprise en deux tweets le jeudi 10 décembre, dans le premier pour annoncer un accord de normalisation entre le Maroc et l’entité sioniste, le qualifiant d' »avancée historique », le second annonçant qu’il reconnaissait la souveraineté du royaume sur le Sahara occidental, la presse marocaine jubile, tandis que les Marocains affichent leur colère.
Pour ces derniers, cette simultanéité entre la normalisation avec ‘Israël’ et la reconnaissance de la marocanité du Sahara occidental disputée par des indépendantiste du Polisario, est inadmissible.
Leurs réactions offusquées fusent sur les réseaux sociaux marocains.
Le mot-dièse « la normalisation est une trahison » était le vendredi 11 décembre parmi les plus populaires, bien loin derrière le mot-dièse « Sahara », rapporte l’AFP. Selon laquelle tout autant que le « Sahara marocain », la cause palestinienne est considérée comme une « cause nationale » au Maroc.
« Non à la normalisation au nom du Sahara marocain », était leur mot d’ordre exprimé par le Groupe d’action national pour la Palestine
Inversement, du côté des médias marocains, c’est l’euphorie.
Selon l’AFP, ils ont unanimement salué comme une « victoire » la reconnaissance de la « marocanité du Sahara »,
Même son de cloche de la part des membres du gouvernement, contrôlé par les islamistes du parti « Justice et Développement ».
« La reconnaissance de la marocanité du Sahara » est « une percée diplomatique historique », a dit jeudi à l’AFP le ministre des Affaires étrangères Nasser Bourita.
Selon le chef de la diplomatie marocaine, c’est au terme de « plusieurs années de travail » que les efforts de son pays sur le dossier du Sahara ont été « couronnés par la reconnaissance des Etats-Unis » de la souveraineté marocaine sur ce territoire.
Une position qui contraste avec celle exprimée depuis plusieurs mois, lorsque les médias israéliens avaient évoqué un « deal ».
Le Premier ministre islamiste, Saad-Eddine El Othmani, avait été le seul à réagir en condamnant en août « toute normalisation », jugeant « toute forme de concession inacceptable ».
Le jeudi, il a annoncé que son pays refusait le « deal du siècle » et « la judaïsation » de la ville sainte d’al-Quds Jérusalem occupée.
Du côté des formations politiques, toutes celles qui font partie de la coalition gouvernementale ou sont proches du pouvoir ont salué la reconnaissance américaine du Sahara et rendu hommage à la position du monarque marocain dans laquelle il assure la position constante de son pays de soutien à la cause palestinienne, rapporte France24.
Ce n’est pas le cas du parti républicain qui a accusé le roi de « rejoindre la caravane de la traitrise ».
La normalisation à l’acte
Dans les faits, le processus de normalisation passe aux actes: les Etats-Unis ouvrent un consulat à Dakhla, le grand port du Sahara occidental, le Maroc, lui, « rouvre » en Palestine occupée par ‘Israël’, « non pas une ambassade mais un bureau diplomatique » existant de 1994 à 2002, à l’époque où le roi Hassan II soutenait le processus « de paix » marqué par les accords israélo-palestiniens d’Oslo en 1993. Selon un haut responsable diplomatique marocain, cité par l’AFP, et qui semble peser ses mots.
La négociation inclut aussi l’ouverture de liaisons aériennes directes entre le Maroc et la Palestine occupée où vivent quelques 700.000 juifs d’origine marocaine, mais aussi une « action pour l’investissement » côté américain et un développement de la « coopération économique » avec ‘Israël’, selon la même source.
À noter que le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo a tenté de tempérer « l’annonce tonitruante de Donald Trump », selon le terme de l’AFP, en arguant que Washington plaidait toujours pour un dialogue avec le Polisario.
« Les Etats-Unis continuent de penser que seules des négociations politiques peuvent résoudre les désaccords entre le Maroc et le Polisario », a-t-il dit dans un communiqué, défendant aussi le plan d’autonomie marocain comme base des discussions.
Un faux-semblant destiné à paraitre s’aligner dans la continuité la politique affichée de l’ONU, qui a pour sa part affirmé que sa position sur le Sahara occidental restait « inchangée ». L’organisation plaide depuis des années, sans grand résultat, pour une solution politique négociée concernant le statut de ce « territoire non-autonome », hérité du passé colonial du continent africain. Des négociations sous son égide sont au point mort depuis le printemps 2019.
Pourtant à la mi-novembre, l’ONU a laissé le Maroc qui contrôle déjà les deux tiers du Sahara occidental, conforter ses positions sur le terrain, en déployant ses troupes dans une zone tampon que l’organisation internationale contrôlait jusque-là. Une démarche destinée à « sécuriser » la seule route vers l’Afrique de l’Ouest, d’après l’AFP.
Toutefois, certains observateurs craignent le contraire, avec la signature de l’accord de normalisation, et appréhendent les riques d’un embrasement.
« Cet accord maroco-israélien pourrait réaliser la paix pour Tel Aviv et ses colons , mais c’est en revanche un projet de discorde et d’instabilité entre les Etats de l’Union maghrébine qui sont restés immunisés face aux troubles et aux guerres qui ont ravagé l’Orient arabe durant ces deux dernières années », s’est pour sa part inquiété Ray al-Yaoum, le site en ligne arabophone londonien .
Source: Divers