Forces séparatistes arméniennes du Nagorny Karabakh et armée azerbaïdjanaise ont intensifié dimanche 4 octobre les échanges de tirs d’artillerie, visant notamment la capitale indépendantiste et la deuxième ville d’Azerbaïdjan, au huitième jour de combats meurtriers.
Les deux camps ont aussi multiplié les déclarations belliqueuses, faisant fi des appels à la trêve de l’essentiel de la communauté internationale, et se rejetant la responsabilité du conflit.
Depuis vendredi Stepanakert, principale ville du Karabakh, a été la cible de frappes, forçant la population à se terrer dans les caves et les abris.
Depuis la nuit de samedi à dimanche, la ville est en outre privée d’électricité.
Les tirs de roquettes ont repris avec une intensité nouvelle dimanche vers 09H30 (05H30 GMT), ont constaté les journalistes de l’AFP dans la cité, où les sirènes retentissent de manière quasi-incessante.
Le centre et la périphérie ont été touchés, et au nord-est de la fumée noire s’élevait dans le ciel.
Les habitants se réfugient dans les abris existants, comme la crypte d’une église où plusieurs familles se sont terrées dans une atmosphère résignée.
« Les forces azerbaïdjanaise visent des cibles civiles », a accusé le porte-parole du ministère arménien de la Défense, Arstroun Hovhannissian.
Selon les autorités locales, il s’agit de tirs de système de lance-roquettes multiples Smertch et Polonez. Des drones survolent aussi la ville.
Le président de la république auto-proclamée, Araiyk Haroutiounian a annoncé qu’en représailles ses forces allaient désormais viser les infrastructures militaires installée dans les « grandes villes » d’Azerbaïdjan, située à plus grande distance du front, appelant les « civils à immédiatement quitter ces villes ».
« Ce n’est que le premier »
Peu après, le ministère azerbaïdjanais de la Défense a annoncé que la seconde ville du pays « Gandja est sous le feux des forces arméniennes ». Bakou a accusé l’Arménie de procéder aux tirs, ce que Erevan dément.
La porte-parole de la présidence du Karabakh, Vagram Pogossian a revendiqué ces frappes comme étant séparatistes, et affirmé que l’aéroport militaire avait été « détruit ».
« Ce n’est que le premier », a-t-il proclamé.
L’Azerbaïdjan a aussi fait état de tirs de roquettes sur « les villes de Terter et Horadiz, dans la région de Fizouli » depuis Stepanakert.
Sur le front, comme les jours précédents, les deux camps revendiquaient des succès sur divers champs de batailles.
Samedi soir, le président de la république auto-proclamée a assuré que « l’armée a amélioré ses positions, préparant le terrain pour des avancées ».
Le ministère azerbaïdjanais de la Défense a lui affirmé que depuis le début des combats le 27 septembre, quatorze villages avaient été conquis, ainsi qu’un massif montagneux qualifié de stratégique, le Mourovdag.
Le président azerbaïdjanais Ilham Aliev a annoncé samedi soir sur Twitter la conquête dans cette seule journée de sept villages.
Retrait des « territoires occupés »
Quelques heures plus tôt, il avait réaffirmé que seul un retrait des forces arméniennes des « territoires occupés » pouvaient mettre fin au conflit datant des années 1990.
Le Premier ministre arménien Nikol Pachinian a lui estimé que l’Arménie faisait face « au moment peut-être le plus décisif de son histoire » contemporaine, appelant à la mobilisation pour « la victoire ».
Le Nagorny Karabakh, majoritairement peuplé d’Arméniens, a fait sécession de l’Azerbaïdjan à la chute de l’URSS, entraînant une guerre au début des années 1990 qui a fait 30.000 morts. Le front y est quasiment gelé depuis malgré des heurts réguliers.
Les deux camps s’accusent de la reprise des hostilités le 27 septembre, une crise parmi les plus graves, sinon la plus grave, depuis le cessez-le-feu de 1994, qui laisse craindre une guerre ouverte entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.
Concernant le bilan, toujours très partiel Bakou ne communiquant pas ses pertes militaires, 245 morts ont été recensés: 209 combattants séparatistes, 14 civils du Karabakh et 22 civils azerbaïdjanais. Mais chaque partie affirme avoir tué plus de deux mille soldats adverses chacune.
Une guerre ouverte entre les deux pays ex-soviétiques du Caucase du Sud laisse craindre une déstabilisation d’ampleur, de multiples puissances étant en concurrence dans la région: la Russie, traditionnel arbitre régional, la Turquie, alliée à l’Azerbaïdjan, Israel qui exploite les deux bélligérants ou encore les Occidentaux.
Source: Avec AFP