C’est avec deux langages que le numéro trois de la diplomatie américaine David Hale s’est adressé aux responsables politiques libanais qu’il a rencontrés lors de sa récente visite au Liban, le 15 août dernier.
Les sources informées qui l’ont constaté se sont confiées pour la correspondante d’al-Manar.
Une précaution linguistique de la part du secrétaire d’état adjoint américain pour les Affaires étrangères qui se veut sans doute camoufler l’ampleur de l’ingérence américaine dans les affaires internes libanaises, à un moment charnier pour le Liban. Et faire oublier les intrusions insolentes de l’ambassadrice de son pays au Liban Elizabeth Shia. Le mois passé, elle s’est mise à accuser le Hezbollah d’avoir causé la crise économique. Ce qui lui a valu une requête présentée par le bloc parlementaire de ce dernier auprès du gouvernement pour qu’elle respecte les limites dictées par la convention de Genève.
Ainsi lorsque Hale a rencontré successivement des responsables officiels, dont le président de la République Michel Aoun, le chef du gouvernement démissionnaire Hassane Diab et le directeur général de la Sureté générale Abbas Ibrahim, il a indiqué que « les Américains s’intéressent à ce que veut le peuple libanais », et à ce que « le prochain gouvernement puisse réaliser des réformes et lutter contre la corruption, selon les sources informées ». Un ton général qui veut paraitre s’inscrire dans la lignée de la volonté du peuple libanais.
Mais lorsqu’il a rencontré les forces considérées être les alliés de son pays au Liban, dont le chef du courant du Futur, Saad Hariri, celui du parti socialiste progressiste (PSP) Walid Joumblatt et celui du parti des Forces libanaises (FL) Samir Geagea, le ton de l’immixtion américaine était nettement plus accentué.
Il leur a dit: « nous coordonnons avec les Français sur un ensemble d’idées. N’ayez crainte, nous n’allons pas vous abandonner », assurent ces sources.
Il a toutefois rejeté l’appel de certains d’entre eux pour des élections parlementaires anticipées, « parce que leurs facteurs ne sont pas réunis ». Estimant que les démissions qui ont eu lieu ne sont pas fructueuses.
Après l’explosion meurtrière du port le 4 août, huit députés ont quitté le Parlement libanais dans une tentative sournoise de renversement de la donne politique. Dont du PSP et des Kataëb. Ceux des FL s’étant désistés à la dernière minute. Après la démission du gouvernement de Diab, qui a refusé qu’on lui impute la responsabilité de l’explosion du port qui a fait près de 180 martyrs et plus de 6.000 blessés. Sanc compter les destructions qui coûtent 15 milliards de dollars selon le chef de l’Etat.
Auprès des dirigeants du 14-mars, la principale préoccupation de Hale semblait être la nature du prochain gouvernement libanais. Il a fait part que son pays ne soutenait pas celui de technocrates.
Ses hôtes lui avaient proposé un gouvernement similaire à celui de Hassane Diab. Mais à leur avantage. En d’autre termes, un gouvernement où les protagonistes du 8-mars ne seraient pas représentés. Une formule qui ne saurait passer par le Parlement libanais où le 8 mars détient une majorité qui permet de le bloquer.
Ce que Hale devrait connaitre parfaitement.
Autre précaution linguistique de sa part qui rime avec son double langage : il serait donc question d’un gouvernement qui ne soit pas d’union nationale, mais qui représente les différentes forces politiques élues par le peuple, « un gouvernement qui ne soit pas provocant et qui puisse être fort et capable de réaliser des exploits », relaient les sources d’al-Manar.
Faute de quoi les Américains auront recours à « des sanctions encore plus élargies ». En revanche, la menace a été proférée sans détour, s’inscrivant dans la lignée des pressions maximales que l’administration de son pays exerce sur le pays du Cèdre depuis plusieurs mois.
Ses alliés libanais auraient suggér à Hale trois noms pour le poste de Premier ministre: l’ex-diplomate Nawwaf Salam, l’ex vice-président de la Banque du Liban Mohamad Baasiri et l’ex-ministre de l’intérieur Raya al-Hassan, indiquent les sources d’al-Manar. Ils devraient faire l’objet de concertations avec les alliés régionaux…
La candidature des premier et second est entièrement inadmissible pour le Hezbollah, le mouvement Amal et le CPL.
Contrairement à celle de Saad Hariri. Hale l’envisage sérieusement, indiquent les sources. Ce serait donc son joker.
Or, depuis sa démission, à l’issue du mouvement de contestation d’octobre 2019 contre l’effondrement économique dont il est tenu responsable, l’ex-Premier ministre prône « un gouvernement non politique ». Il avait alors été remplacé par M. Diab par le camp du 8-mars. Rien n’illustre que ce dernier a changé d’avis. Lors de son récent discours, le numéro un du Hezbollah sayed Hassan Nasrallah avait évoqué un gouvernement d’union nationale. Et rien d’autre.
Source: Divers