L’Iran fait encore face à « quelques problèmes mineurs » d’émeutes a reconnu, ce lundi 18 novembre, le gouvernement iranien, tout en notant que la situation à l’échelle nationale était « plus calme » que la veille.
« Par comparaison avec hier (dimanche), la situation est à 80% plus calme.
Il y a (encore) quelques problèmes mineurs et demain ou après-demain nous n’aurons plus aucun problème d’émeutes », a déclaré à la presse le porte-parole du gouvernement iranien, Ali Rabii.
Emeutiers avec des armes blanches et des armes à feu
Selon les agences iraniennes, au moins 25 villes iraniennes ont été touchées par des manifestations ou des émeutes.
« Il y a eu des rassemblements dans certaines villes, dans certaines provinces », a déclaré M. Rabii, sans plus de détails.
« Ce que je peux vous dire aujourd’hui, c’est que le nombre de rassemblements est inférieur de 80% à ce qu’il était la veille », a-t-il ajouté.
« Si le premier jour certaines personnes qui s’inquiétaient (de la hausse du prix de l’essence ont pris part) à la contestation, ce que nous voyons depuis (dimanche) ce ne sont pas des gens ordinaires inquiets », a encore dit M. Rabii.
« Les méthodes ont changé : ils sont venus avec des armes blanches et des armes à feu. Au lieu de scander des slogans et de protester, ils ont commencé à attaquer des installations publiques, même des centres militaires » ou des « installations de la police », a-t-il poursuivi.
Alors que les médias iraniens ont fait état de deux morts -un policier et un civil- depuis vendredi, M. Rabii a indiqué que le gouvernement avait « besoin de temps » pour fournir un « bilan définitif » des victimes, sans doute pas avant mercredi.
Il a également laissé entendre que les victimes ne pouvaient pas l’avoir été du fait des forces de l’ordre, mais du fait des émeutiers.
Soutien de Washingtion aux émeutiers
Les Etats-Unis ont exprimé leur soutien à « un groupe d’émeutiers » après des violences survenues dans plusieurs villes iraniennes lors de manifestations contre une hausse du prix de l’essence.
« Comme je l’avais dit au peuple iranien il y a presque un an et demi : les Etats-Unis sont avec vous », avait écrit samedi le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo sur Twitter.
Ces propos sont « l’expression du soutien du secrétaire d’Etat américain à un groupe d’émeutiers », écrit le ministère des Affaires étrangères iranien dans un communiqué publié dans la nuit de dimanche à lundi.
Le ministère « condamne ces remarques […] interventionnistes », ajoute le texte, jugeant que « le noble peuple iranien sait bien que les remarques hypocrites de ce genre ne traduisent aucune marque honnête de sympathie ».
Des manifestations ont éclaté, le 15 novembre, dans plusieurs villes d’Iran pour protester contre la hausse du prix de l’essence décidée par le gouvernement.
Un policier iranien, le lieutenant Iraj Javaheri, a perdu la vie des suites de ses blessures. Il avait été la cible d’un tir d’assaillants armés, lors d’un rassemblement à Kermanshah (ouest du pays) contre l’annonce de la hausse du prix de l’essence.
S’exprimant avant l’annonce de la mort du policier, le guide suprême de la Révolution islamique, l’Ayatollah Sayed Ali Khamenei, dont les propos sont rapportés par Reuters, avait affirmé : «Le sabotage et les incendies criminels sont le fait de hooligans, pas de notre peuple. La contre-révolution et les ennemis de l’Iran ont toujours soutenu le sabotage et [ont exploité] les brèches de sécurité.»
Pourquoi Rohani rationne l’essence
Le rationnement de l’essence a été décrété par le gouvernement Rohani au risque de provoquer des mécontentements et pourtant la décision a été prise. Pourquoi ?
Les taxis et les ambulances disposeront respectivement d’un quota mensuel de 400 litres et de 500 litres, précise le communiqué de la Compagnie nationale iranienne de distribution pétrolière (NIOPDC) qui ajouté que le prix du CNG et du gazole restera inchangé.
Le prix à la pompe en Iran fait partie des moins chers au monde. La ration mensuelle de chaque automobile est ainsi fixée à 60 litres par mois et 15 000 rials le litre.
Les achats supplémentaires coûteront 30 000 rials le litre. La NIOPDC a déclaré dans un communiqué, le jeudi 14 novembre dans la soirée que le prix d’un litre d’essence ordinaire avait grimpé à 15 000 rials (12.7 cents US).
Alors pourquoi cette hausse à la pompe ? L’ancien représentant de l’Iran à l’OPEP et directeur des affaires internationales de la NIOPDC, Mohammad-Ali Khatibi revient sur ce sujet en précisant qu’avec la mise en exécution de ce plan, le gouvernement verrait son potentiel de plus en plus renforcé pour pouvoir faire face aux sanctions.
« La raffinerie « Setareh Khalij Fars », le plus grand complexe de production de l’essence au Moyen-Orient (Étoile du golfe Persique) a été créée au plus fort des sanctions en Iran et elle est opérationnelle depuis 2018 et ce, pour rendre le pays autosuffisant dans le domaine de la production d’essence et donc de son exportation.
Or le brut est un produit largement exposé aux sanctions. Le rationnement du pétrole produit dans cette raffinerie permettra de booster l’exportation de l’essence, quitte aussi à permettre au gouvernement de hausser ses recettes en devises et à faire face aux sanctions US.
Le rationnement de l’essence en réduirait en même temps la consommation, ce qui compte en termes de préservation de l’environnement.
Cette mesure s’ajoute à une autre mise en oeuvre depuis plusieurs mois à savoir la cotisation de l’essence iranien et sa vente sur le marché de la bourse».
Sources : AFP + PressTV + Reuters