Tout en confirmant l’attaque aux drones des combattants yéménites contre le champ pétrolier d’Al-Chiba, le ministre saoudien de l’Énergie a tenté d’en amoindrir la portée et pourtant les images diffusées par NASA, le dimanche 18 aout, prouve une autre version des faits.
L’incendie provoqué par la frappe aux drones contre le méga gisement d’Al-Chiba est loin d’avoir été maîtrisé à en croire la photo publiée par NASA.
Le ministre saoudien de l’Énergie Khaled al-Falih, cité par l’agence officielle SPA, a pourtant précisé que « l’attaque, qui a eu lieu vers 06H20 locales (03H20 GMT) et menée par des drones piégés contre une installation de gaz naturel liquéfié (GNL) du champ Al-Chiba, a provoqué des incendies qui ont été maîtrisés. Les dégâts matériels n’étaient pas importants, et cette attaque n’a pas fait de victimes », a ajouté le ministre saoudien.
Il a ajouté que son pays condamnait « dans les termes les plus vigoureux cette attaque lâche… Ce sabotage terroriste fait suite à une série d’actes visant à perturber les approvisionnements en pétrole du marché international, dont des attaques contre des pétroliers. Ces actes ne sont pas seulement dirigés contre l’Arabie saoudite, mais aussi contre l’économie mondiale », a-t-il fanfaronné sans évidemment évoqué la vague de frappes aériennes cette semaine contre les zones civiles yéménites qui ont fait des dizaines de morts civils.
La raffinerie Al-Chiba, située à 1200 km de Saada a été prise pour cible par 10 drones.
C’est la première fois que l’Arabie saoudite reconnait aussi rapidement les capacités de combat et la puissance de feu d’Ansarullah, ce qui constitue une très importante évolution.
Selon les analystes la spectaculaire frappe aux drones de samedi contre le second grand gisement pétro-gazier de l’est saoudien pourrait approfondir les divergences au sein d’une coalition déjà largement fragilisée sur fond des évènements à Aden.
L’ex-commandant de l’armée saoudienne, Ali Ghoraichi a accusé juste après l’attaque aux drones d’Ansarullah les Emirats d’avoir « collaboré avec Ansarullah. Cette frappe a été menée avec la complicité des Emirats et elle a visé le plus grand stock stratégique énergétique de l’Arabie saoudite », écrit le commandant dans un tweet.
« C’est une attaque qui en dit long sur les divergences qui existent dans nos relations avec les Emirats et qui ont éclaté au grand jour à Aden. Pourquoi Al-Chiba et pourquoi le jour où les Emirats nous reprenaient le contrôle d’Aden? Après tout une attaque en provenance des Emirats est plus facile et plus faisable qu’en provenance de Saada! » a prétendu ce commandant saoudien.
L’attaque contre Al-Chiba : une mise en garde contre Abou Dhabi
Le leader du mouvement Ansarullah, Sayed Abdel Malek al-Houthi, a évoqué le samedi 17 août 2019, l’opération lancée par l’unité de drones des forces yéménites contre le champ pétrolier d’Al-Chiba affilié à Aramco, en la qualifiant de la plus grosse attaque menée contre le royaume saoudien depuis le début de la guerre lancée par ce dernier contre le Yémen en mars 2015.
Le leader d’Ansarullah a déclaré que cette opération est une mise en garde adressée à Abou Dhabi. Il a promis aux dirigeants saoudiens et émiratis que leurs pays allaient subir encore plus de dégâts matériels si jamais ils ne mettaient pas un terme rapide à leur agression contre le peuple yéménite.
« Les États-Unis ne font que se servir de vous et de vous extorquer de l’argent », a-t-il ajouté à l’adresse de l’Arabie et des Emirats.
Sayed al-Houthi a rappelé Ryad qu’il ne gagnera rien en continuant cette guerre et qu’il n’y a par ailleurs aucune raison valable pour la poursuivre.
M.Al-Houthi a en outre fait référence aux dernières évolutions à Aden en affirmant que ce qui s’était passé dans le sud du Yémen avait un rapport direct avec les complots que mijote la coalition saoudienne.
Il a expliqué: « dans le sud du Yémen, l’objectif des ennemis, c’est l’occupation et le démantèlement du pays et c’est un sujet sur lequel nous avons insisté depuis le début de la guerre. »
« L’Arabie saoudite, les Émirats et tous leurs alliés de la coalition dite « arabe » étaient désormais englués dans cette guerre et qu’ils ne savaient plus par quelle porte en sortir », a fait savoir le numéro un d’Ansarullah.
Pour sa part, le porte-parole adjoint des forces armées yéménites, le brigadier général Aziz Rashid, a affirmé que « l’attaque (contre le champ pétrolier d’al-Chiba) envoie le message suivant : la prochaine attaque visera les Émirats arabes unis. »
Sanaa nomme un ambassadeur à Téhéran
Ailleurs dans son discours, Sayed al-Houthi a défendu les relations avec l’Iran. « La [seule] position de soutien franc et clair avec notre peuple et de condamnation de l’agression est venue de la République islamique d’Iran », a-t-il notamment déclaré.
La guerre saoudienne contre le Yémen a fait des dizaines de milliers de morts, et le pays connaît la pire crise humanitaire du monde, selon l’ONU.
Dans ce contexte, les autorités à Sanaa ont nommé, Ibrahim al-Daïlami, ambassadeur à Téhéran, ont rapporté samedi soir (17 aout) les médias yéménites. Cette nomination intervient quelques jours après une visite d’un haut responsable d’Ansarullah à Téhéran.
Membre du bureau politique d’Ansarullah, M.Dailami occupait le poste de directeur général de la chaine de télévision yéménite AlMasirah.
Taez dans la ligne de mire des Emirats
S’agissant des hostilités au sein de la coalition, les efforts saoudiens vont bon train pour rétablir le calme dans la ville d’Aden, au moment où les Emirats arabes unis continuent de déployer leurs efforts visant à consolider, via leurs mercenaires, le contrôle de la côte ouest du Yémen.
En fait, la province de Taez s’attend à une escalade majeure dans les combats opposant les mercenaires soutenus par Ryad à ceux appuyés par les Emirats.
Rappelons que la semaine dernière, la force « Cordon de sécurité », bras armé du Conseil de transition du sud (STC, séparatistes pro-émiratis), a pris aux forces pro-Hadi (soutenus par Ryad) le contrôle du palais présidentiel, du siège du gouvernement et de positions militaires clés.
Les combats ont fait en quatre jours 40 morts et 260 blessés selon l’ONU. Et ils ont surtout mis à mal la cohésion de la coalition dirigée par Riyad contre les forces yéménites (armée + Ansarullah) qui contrôlent la capitale Sanaa et une bonne partie du nord du pays.
Sources: PressTV + Agences