À peine quelques mois après l’élection du président américain, les analystes ont commencé à qualifier de « chicken game » sa stratégie face aux autres pays.
La stratégie du chicken game se dit quand un pays, par exemple les États-Unis, continue de tendre la situation et de provoquer la partie adverse jusqu’à ce que cette dernière conclue qu’une confrontation lui coûte plus cher qu’un compromis et qu’elle jette l’éponge.
En mai 2019, c’est-à-dire un an après le retrait des États-Unis de l’accord nucléaire, le conseiller à la sécurité nationale des États-Unis John Bolton, connu pour ses appels au renversement de l’État iranien, a fait part du déploiement du porte-avions USS Abraham Lincoln dans le golfe Persique.
À cette époque-là, il semblait que le chicken game était entré dans son étape finale et que la confrontation s’annonçait de plus en plus proche.
Mais tout a changé le 20 juin, quand un drone géant sophistiqué des États-Unis a été abattu par la DCA iranienne alors qu’il survolait les côtes du Hormozgan.
Dans ce droit fil, Strategic Forecasting, Inc, plus couramment appelé STRATFOR, une société privée américaine qui œuvre dans le domaine du renseignement, a publié un rapport selon lequel l’Iran a pris l’initiative juste au moment où le chicken game se trouvait dans sa phase finale.
« L’Iran, non seulement a pris l’initiative lors de la phase finale du chicken game, mais en plus ce pays a lancé son propre chicken game en commençant à se libérer peu à peu de ses engagements pris dans le cadre de l’accord nucléaire, ce qui a placé la partie adverse face à un dilemme compliqué », indique le rapport de STRATFOR.
Pour Matthew Bey, analyste chevronné de STRATFOR et auteur de cet article, « ce n’est que le début de ce jeu, dont l’objectif est faire contraindre les États-Unis à se plier aux exigences de l’Iran : lever toutes les sanctions américaines et garantir la sécurité de l’Iran ».
Il est à noter que ce jeu a commencé par un acte très risqué, à savoir la destruction d’un drone américain de type Global Hawk, ce qui aurait pu entraîner une attaque limitée des États-Unis en représailles. Mais Téhéran a accepté de prendre ce risque.
Quelles seront, selon STRATFOR, les prochaines étapes de ce chicken game ?
-Le gel des opérations de modification du réacteur à eau lourde d’Arak. (L’Iran et la Chine sont en train de modifier le réacteur à eau lourde d’Arak afin de priver ce réacteur de sa capacité de produire du plutonium nécessaire à la fabrication d’armes.)
-L’installation d’un nombre plus grand de centrifugeuses ou de centrifugeuses plus sophistiquées.
-La limitation de l’accès des inspecteurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique aux sites délicats.
-La suspension du protocole additionnel (le protocole additionnel fournit un accès plus vaste aux inspecteurs pour vérifier les installations nucléaires).
-Le retrait du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).
-Accélérer les recherches destinées à produire des propulsions nucléaires utilisées pour le transport maritime (la production de propulsions nucléaires nécessite de l’uranium hautement enrichi, interdit à l’Iran par le Plan global d’action conjoint, PGAC).
-Tester ou bien examiner profondément le mécanisme d’activisation d’une bombe atomique
« D’autre part, les discussions entre Téhéran et les Européens pour trouver un accord permettant la réduction de sanctions se sont retrouvées dans une impasse et la patience de l’Iran a déjà atteint ses limites. La seule voie qui reste donc pour l’Iran est de continuer ce chicken game pour tester la réaction de la partie adverse au cours de chacune des étapes.
Du côté des Américains, ils auront le choix entre rester les bras croisés lors de toutes les étapes de désengagement de l’Iran quant à l’accord nucléaire, ou y réagir par une action militaire.
L’Iran s’est déjà préparé à faire face à ces deux options, mais il faut que les États-Unis sachent une chose: s’ils choisissent l’option militaire pour répondre à l’Iran, cela pourrait allumer la mèche d’un conflit d’envergure au Moyen-Orient, susceptible de s’étendre même vers les pays voisins de l’Iran », indique le rapport.
Source: Avec PressTV