Une vidéo du 4 octobre 2018 évoque la scène d’une récolte d’olives. Après tout, c’est la saison. Deux jeunes, dont au moins un est mineur, tiennent une grande bâche. Le plus petit d’entre eux tient un bâton et donne des coups à un arbre [pour faire tomber les olives], mais plutôt que de récolter les olives, les coups cassent les branches de l’olivier.
Les oliviers du village palestinien de Burin, en Cisjordanie, dans le nord de la Cisjordanie, n’appartiennent pas à ces jeunes hommes, et personne ne leur a donné la permission de récolter des olives dans cette oliveraie à l’ouest du poste de contrôle de Hawara. Ils sont indubitablement juifs, comme l’indiquent clairement leurs kippas blanches, leurs papillotes et leurs franges rituelles tzitzit.
On a demandé à un résident de Burin, qui sera identifié ici seulement comme N., de filmer ce qui se passait. Il a réussi à arriver sur les lieux environ 20 minutes plus tard. Il a appelé la police et, à leur arrivée, 15 à 20 minutes plus tard, il avait réussi à filmer les jeunes hommes donnant des coups contre trois arbres.
Quand les intrus ont aperçu le véhicule de police, ils se sont enfuis. N. a expliqué que la police a ensuite trouvé trois sacs d’olives dans l’une des deux maisons abandonnées de l’oliveraie, dont l’une appartient au propriétaire de ce dernier.
La deuxième maison appartient à une famille de Naplouse que les Juifs ont expulsée, au début de la deuxième intifada [qui a commencé en septembre 2000], après avoir jeté dehors tous leurs meubles et leurs biens. Cela s’est passé il y a une vingtaine d’années, et cette famille n’est jamais revenue vivre dans sa maison.
Les deux maisons et les centaines [1 dounam = 1000m2] de terres privées qui les entourent sont considérées comme une zone dangereuse et les Palestiniens doivent se coordonner avec l’armée israélienne pour y entrer.
La permission n’est accordée que deux ou trois fois par an. Et pourquoi donc cette zone est-elle dangereuse. C’est parce qu’elle recèle également une source d’eau. Celle-ci était autrefois utilisée pour irriguer les oliveraies de Burin, mais les Israéliens en ont fait un lieu réservé aux bains religieux rituels et aux loisirs.
C’est également parce que cette zone est près de la colonie juive de Har Bracha et de l’avant-poste non «autorisé» de Givat Ronen. C’est donc pour éviter les «frictions» que les autorités d’occupation interdisent aux propriétaires palestiniens de la terre d’y accéder.
Les policiers ont finalement trouvé les deux jeunes hommes aux franges rituelles sous un grand arbre. N. les a vus être emmenés dans la voiture de police. Lorsque le propriétaire de l’oliveraie est arrivé, il a découvert que d’autres arbres avaient également été cognés de la même manière, apparemment deux ou trois jours plus tôt, et qu’une part importante des olives avait disparu.
Le bureau du porte-parole de la police israélienne pour le district de Cisjordanie a fait la déclaration suivante sur cette affaire : «Grâce à l’action déterminante de la police israélienne, trois jeunes suspects ont été arrêtés pour vol agreste et délits à motivation raciste. L’enquête est toujours en cours, et quand elle sera terminée, l’affaire sera renvoyée pour examen et décision par le Bureau du Procureur de la République.»
Une violence «fonctionnelle» des colons; s’emparer des terres de Palestiniens
N. a été invité à se rendre au poste de police de la colonie d’Ariel [quelque 20’000 habitants], en Cisjordanie occupée, pour rendre compte de l’incident. Il a raconté que pour prendre note de sa déposition le policier avait utilisé l’extérieur de sa voiture de patrouille en guise de bureau.
Il a signalé à la police d’occupation des incidents similaires dans son village, mais les plaintes des villageois n’ont jamais abouti à des accusations pénales ou à des condamnations qui pourraient dissuader d’autres personnes de commettre ce genre de forfaits.
Selon les chiffres des Nations Unies et les informations fournies par N., le récent vol d’olives est l’un des 48 actes de violence et de vandalisme commis par des colons israéliens à Burin au cours des seules trois dernières années. Il y a eu six attaques en 2016, 18 en 2017 et 24 jusqu’ici, durant cette année 2018.
La nature des incidents a varié: raids de colons accompagnés de soldats qui les couvraient; jets de pierres sur des personnes, dont des bergers et aussi des maisons; champs et vergers incendiés; vols d’olives; abattage ou dégradation d’arbres; attaques contre des agriculteurs au travail.
Le 13 octobre, N. était présent lors d’une récolte d’olives sur des terres appartenant à des villageois de Burin et Hawara, au sud de Givat Ronen. Les choses se sont passées de manière similaire à l’incident décrit ci-dessus: des Israéliens sont descendus de l’avant-poste pour jeter des pierres, faisant fuir les cueilleurs d’olives. Ensuite l’un des Israéliens s’est approché des bâches sur lesquelles les olives avaient été collectées, il a jeté les olives dans le taillis et s’est emparé des bâches. «Et tout cela a été enregistré sur une vidéo» a ajouté N.
Selon les chiffres des Nations Unies, sur les 99 attaques documentées dans ces villages voisins, 13 étaient des incendies criminels. Au moins 1’700 arbres et de nombreuses cultures ont été vandalisés dans les trois villages au cours des trois dernières années.
Madama, Asira al-Qibliya et Einabus figurent également sur la liste des villages qui ont été attaqués sur le même territoire de 25 kilomètres carrés (16 miles). Cette zone ne représente qu’une petite partie – un demi pour cent – de la Cisjordanie occupée, et un récent rapport publié par l’ONG israélienne Yesh Din, porte sur cet épicentre de violence.
Le rapport s’intitule «Yizhar – Une étude de cas, la violence des colons comme moyen de s’emparer des terres palestiniennes avec le soutien de l’État et de l’armée.»
les organisations israéliennes de défense des droits humains, B’Tselem et Yesh, ont documenté, en octobre, 12 cas d’attaques contre des cueilleurs d’olives ou des dommages infligés aux arbres qui auraient été commis par des Israéliens en Cisjordanie occupée.
Avec A l’encontre