Les Etats-Unis ont promis lundi d’exercer une pression « implacable » pour faire plier l’Iran, qui entend « contourner avec fierté » les sanctions draconiennes rétablies par Washington contre les secteurs pétrolier et financier iraniens.
Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo a dévoilé la liste des huit pays autorisés, pendant encore six mois au moins, à continuer d’acheter du pétrole à Téhéran: la Chine, l’Inde et la Turquie (les premiers importateurs de brut iranien avec l’Union européenne), ainsi que le Japon, la Corée du Sud, Taïwan, l’Italie et la Grèce.
L’administration de Donald Trump, qui a claqué la porte en mai de l’accord de 2015 censé empêcher l’Iran de fabriquer la bombe atomique, a terminé lundi de rétablir toutes les sanctions levées après sa signature.
De telles dérogations, au motif que ces pays se sont engagés à continuer de réduire leurs achats, avaient déjà été octroyées par la précédente administration démocrate de Barack Obama de 2012 à 2015.
Mais l’actuel gouvernement républicain affirme être beaucoup plus strict et affiche toujours l’objectif de ramener à zéro les exportations iraniennes de brut, qui assurent 40% des recettes de l’Etat iranien. Elles ont déjà baissé d’environ un million de barils par jours (mbj) depuis mai, pour s’établir à 1,6 mbj en septembre.
« Virage à 180 degrés »
Washington a énoncé douze conditions pour conclure avec la République islamique un « meilleur accord », « plus complet »: des restrictions beaucoup plus dures à son programme nucléaire, et la fin de la prolifération de missiles et de son interventionnisme jugé « déstabilisateur » au Moyen-Orient.
Tant que l’Iran n’aura pas « pris un virage à 180 degrés », « nous exercerons une pression implacable sur le régime », a martelé lundi Mike Pompeo. A ses côtés, le secrétaire au Trésor Steven Mnuchin a prévenu que « la pression maximale » continuerait de « s’accroître », notamment si l’Iran ou les entreprises étrangères « tentent de contourner les sanctions ».
Or, le président iranien Hassan Rohani a promis lundi, dans un discours télévisé, de « contourner avec fierté » ces « sanctions illégales et injustes ».
« Nous sommes en situation de guerre économique et nous affrontons une tentative d’intimidation. Je ne pense pas que dans l’histoire américaine il y ait eu jusqu’à présent quelqu’un à la Maison Blanche qui contrevienne à ce point au droit et aux conventions internationales », a-t-il clamé.
La bataille se joue aussi sur le terrain de la communication.
Samedi, le guide suprême d’Iran Ali Khamenei a accusé Donald Trump d’avoir « discrédité » les Etats-Unis qui, selon lui, seront les ultimes perdants de cette politique.
« L’Iran va mal », a au contraire relevé dimanche le président américain, dont Téhéran est la principale bête noire et qui voue l’accord sur le nucléaire aux gémonies. « Quand j’ai pris mes fonctions, juste avant, on pensait que l’Iran allait dominer tout le Moyen-Orient (…). Plus personne n’en parle aujourd’hui », a-t-il ajouté, sans préciser quels faits lui permettent de tirer une telle conclusion.
Le président américain assure être prêt à discuter avec les dirigeants iraniens pour négocier un nouvel accord, suivant sa stratégie nord-coréenne qu’il juge couronnée de succès: pression maximale puis négociations et réconciliation.
« La confiance mutuelle n’est pas une condition préalable pour entamer des négociations, mais le respect mutuel oui », a répondu le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif dans un entretien au quotidien USA Today, estimant que Washington doit changer son « approche » pour relancer la diplomatie.
Aide européenne
Malgré une économie en difficulté, de nombreux experts estiment que l’Iran va pour l’instant résister, d’autant que, contrairement à la période pré-2015, les Etats-Unis sont assez isolés. Les Européens, pourtant alliés des Américains, tiennent à préserver un accord sur le nucléaire qu’ils jugent indispensable à la sécurité mondiale, et, pour éviter que Téhéran ne le quitte à son tour et relance la course à l’arme atomique, promettent de l’aider à contourner les sanctions.
« Nous allons faire tout le nécessaire pour préserver et élargir la coopération économique, commerciale et financière avec l’Iran en dépit des sanctions américaines », a aussi réagi le ministère russe des Affaires étrangères.
Ces sanctions s’apparentent à un chantage contre les pays qui commerçaient avec l’Iran: les entreprises asiatiques ou européennes se verront interdites de marché américain si elles continuent d’importer du pétrole iranien, ou d’échanger avec des banques iraniennes ciblées par Washington. Beaucoup ont déjà choisi les Etats-Unis et quitté l’Iran.
Concernant les sanctions financières, quelque 700 individus et entités en Iran ont été placés lundi sur la liste noire américaine, soit davantage que ceux qui en avaient été retirés après l’accord de 2015. Parmi eux, 50 banques iraniennes, plus de 200 personnes et navires des secteurs iraniens du transport maritime et de l’énergie, une compagnie aérienne iranienne et plus de 65 de ses avions.
L’administration Trump souhaite aussi déconnecter l’Iran du circuit bancaire international Swift, ossature du système financier mondial, comme c’était le cas de 2012 à 2016.
Source: AFP